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baignèrent, ramassèrent des coquillages, se firent des confidences et se quittèrent à
regrets. Gisèle dormit peu cette nuit-là tant les retrouvailles l’avaient électrisée.
Le lendemain, elle fût invitée à gouter chez les Senelonge. Elle s’assit sur le bord
de la chaise, ne sachant comment se tenir et ne put s’empêcher de regarder avec
curiosité la précieuse décoration de la pièce. Le père de famille, présent en bout de
table, l’avait toisée à son arrivée avant de se désintéresser totalement d’elle. La mère
des jumelles, vêtue d’une tenue sophistiquée, lui avait témoigné plus d’attention,
s’intéressant à sa famille et à ses occupations à Liévin. Tout en lui répondant, Gisèle
fixait le col de sa robe safranée. Un des boutons pendait, à la limite de se détacher.
Spontanément, elle lui proposa de le consolider.
- Tu sais donc coudre ?
- Oui Madame, coudre, broder, cuisiner et tenir une maison. J’aide ma mère tous
les jours et je m’occupe de mes frères et sœurs.
Madame Senelonge la fixa longuement avec insistance. Gisèle baissa les yeux,
intimidée par son regard perçant, gênée de tant d’attention.
- Tu voudrais bien recoudre le bouton pour moi ?
- Bien sûr Madame, avec plaisir. Je vous rapporterai la robe demain matin si cela
vous convient.
Gisèle rentra, fière de la confiance que cette dame de bonne famille lui témoignait.
Elle raconta l’anecdote à sa mère tout en recousant le bouton, ce qui fut fait en un rien
de temps. Examinant le vêtement, elle reprit quelques coutures qui s’étaient relâchées
et, satisfaite de son ouvrage, plia soigneusement la robe.
Le lendemain, Madame Senelonge accueillit Gisèle avec un grand sourire. Son
mari lui jeta un regard dédaigneux avant de replonger ses yeux dans le journal.
- Magnifique ! s’exclama t’elle en dépliant la robe. Je vais pouvoir la remettre
demain. La voici à nouveau comme neuve.
- J’ai également repris quelques coutures, ici et là, qui menaçaient de se rompre.
Madame Senelonge examina le travail de Gisèle avec minutie et la félicita à
nouveau. Elle tendit quelques pièces à la jeune fille embarrassée.
- Tiens, voilà pour toi. Est-ce que c’est suffisant ?
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