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-Eh bien Sofia, mais qu’est-ce que tu m’as fait ? se plaignit-il.

            -Ce que je t’ai fait ? Et toi, tu te souviens seulement de ce que tu m’as fait ? J’avais dit NON, tu n’avais
            pas le droit, tu as tout gâché ! Je voudrais que tu partes maintenant. Va-t’en !

            -T’es vraiment un salaud ! Un vrai salaud de macho ! Laure et Claire le lui répétèrent deux ou trois

            fois.
            -Quand je pense que je t’ai invité dans cette maison, renchérit Lucie. Et regarde ce que tu as fait à ma

            copine ! Elle a raison, dégage ! Prends ta voiture et dégage le plus vite possible !

            Surpris par notre réaction, par le ton sourd et plein de colère contenue de nos paroles, Nicolas tenta

            quelques excuses un peu maladroites.

            -Ok, j’ai déconné, j’aurai pas dû… je n’sais ce qui m’a pris… pardon Sofia…
            Je ne répondis pas. Nous marchions vers lui. Il tentait de remonter son pantalon tout en contournant la

            table du salon. Nous étions arrivés près de la porte d’entrée, les filles avançant, lui reculant à deux
            mètres de nous. Il attrapa sa veste accrochée dans le couloir, ouvrit la porte et sortit sur le balcon. Le

            froid nous saisit, une petite clarté de lune éclairait la nuit. Nicolas commença à s’éloigner, puis

            brusquement, il se retourna.
            -Vous n’ pouvez pas m’faire ça, les filles, je vais aller où maintenant ? Pitié…


            Et soudain, alors qu’il était en train de nous regarder et de nous parler, il trébucha et bascula en arrière.
            Il rebondit sur les marches de l’escalier et s’étala tout en bas. Il n’avait même pas crié, cela s’était

            passé trop vite. Nous nous sommes précipitées en bas de l’escalier. On l’appela, on le scruta à la lueur
            d’une lampe-torche que Lucie venait d’apporter du garage tout proche. Il ne bougeait plus. On vit

            même un filet de sang couler de sa bouche. Stupeur, effroi, panique. Les émotions se mélangeaient

            dans nos têtes.

            - Merde, j’n’y crois pas ! Il est mort ? Vraiment mort ?

            -On dirait bien, oui… En même temps, c’était un accident. On ne l’a pas fait exprès, on ne l’a pas
            poussé dans l’escalier, il est tombé tout seul !

            -Si on appelle la Police maintenant, ils vont nous poser plein de questions, nous demander pourquoi on

            était dehors en pleine nuit. On va devoir parler de toi Sofia et de ce qu’il t’a fait.
            -Et ils vont dire que c’est de notre faute, que si on ne lui avait pas dit de partir, il serait encore là. J’ai

            peur. Et si on allait en prison ? Non, non, écoutez les filles, il ne faut rien dire. On verra demain…

            Ce premier de l’an 2000, au milieu de la nuit, tremblantes et gelées, mains posées les unes sur les

            autres, nous jurâmes de garder toute notre vie le secret des circonstances de la mort de Nicolas. Nous

            décidâmes aussi de nous retrouver tous les ans la nuit du 31 décembre, quelle que soit la direction que
            prendrait notre vie future et personnelle, afin de sceller à jamais notre amitié.




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