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Une nouvelle vie commençait. Ils s’installèrent dans un petit hôtel particulier du
               centre-ville. Angèle rangea avec regret son chapeau dans l’armoire de sa chambre.

               Les jours passaient et se ressemblaient tous. Au début, elle s’était amusée à
               découvrir la ville et ses magasins de curiosités mais le charme des premières fois

               s’était rapidement estompé. Elle se languissait de Royan, sa ville natale et de ses

               amies restées là-bas. Pierre rentrait tard et était souvent préoccupé par ses
               nouvelles fonctions. Le soir, il l’écoutait d’une oreille distraite lui raconter sa journée.

               Elle regrettait leur complicité amoureuse des premiers jours et s’ennuyait dans cette
               ville étrangère.

               Un matin, alors qu’elle cherchait une étole, elle retrouva son chapeau enfoui sous

               une pile de linge, sans doute rangé là par la bonne. Deux ans déjà ! Le ruban avait
               quelque peu pâli mais il lui rappela le bleu turquoise de la Méditerranée et ce

               merveilleux voyage en Sardaigne. La nostalgie l’envahit. Elle aimait toujours son mari
               et voulait sauver leur couple. Elle songea qu’un séjour chez sa mère leur permettrait

               de mieux se retrouver. Le soir même elle exposait son projet à Pierre. D’abord

               surpris, il réalisa qu’elle se morfondait dans cette ville austère alors il l’encouragea à
               partir quelques jours. Elle prépara sa malle avec empressement, à la fois heureuse

               de partir en voyage mais soucieuse de laisser seul son mari. Il l’accompagna à la
               gare et, sur le quai, lui demanda tendrement :

               - J’espère que tu n’as pas oublié ton chapeau, tu sais, celui de notre voyage de
               noces.

               Angèle fut touchée : il se souvenait… Elle l’embrassa et monta dans le train le cœur

               léger.
               Elle se réjouissait de revoir Anne et Madeleine ses deux meilleures amies. Elles

               s’étaient rencontrées au pensionnat et étaient devenues inséparables. Cela avait été
               un déchirement de les quitter pour s’installer à Limoges mais elle avait dû suivre son

               époux…

               A la gare de Royan, le majordome l’attendait ; il l’accompagna à la villa familiale. Elle
               eut un pincement au cœur : pourquoi ses amies n’étaient-elles pas venues

               l’accueillir ? Elle passa la soirée en famille et les retrouva le lendemain à la plage.
               Toutes trois enfilèrent leurs tenues de bain et se jetèrent à l’eau. Quelle joie de nager

               ensemble comme autrefois ! Elle ne vit pas la semaine passer : déjeuners sur le front

               de mer, promenades dans la campagne environnante, dîners dansants… Angèle
               était heureuse, enfin, presque… Une étrange sensation voilait son bonheur. Elle ne

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