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calendrier, comme l’aménagement, et la décoration de cette maison ? Même la musique était
de cette époque. Jeanne perdait pied elle n’arrivait plus à discerner le vrai du faux, elle n’était
plus maître de ses pensées et semblait voguer au dessus de la pièce comme simple témoin de
la scène qui se passait sous ses yeux. Elle tentait bien de réagir et de trouver des explications,
elle essayait de questionner Julie mais la conversation tournait autour de la guerre, de la mort
de son père et de la détention de son fiancé. Elle se rendait compte que la tâche principale
qu’elle avait à accomplir était de tenir compagnie à Julie, de la laisser parler et divaguer sur le
sort de son fiancé. La pendule venait de sonner 10h00, il était temps de prendre congés. Julie
raccompagna Jeanne et lui donna rendez vous le surlendemain à la même heure.
Avec soulagement Jeanne se retrouva sur le palier, face à l’appartement. Elle se sentit
libérée du poids qui lui pesait de plus en plus au fur et à mesure qu’elle découvrait cette
histoire rocambolesque qu’elle venait d’entendre. Elle mit quelque temps, immobile, devant la
porte du 4 ème étage, à reprendre ses esprits. Elle voulait savoir, connaître la réalité des choses.
La même question la taraudait et revenait sans cesse en boucle depuis son entretien avec
Julie : Etait-elle folle ou avais-je fait un bon en arrière de quatre-vingts ans ? Machinalement
elle monta au 5 ème étage chez madame Boisson comme si elle devait effectuer sa visite
régulière avec une heure de retard.
Le changement était saisissant, bien qu’elle connaisse cet appartement depuis pas mal
de temps, elle ne pouvait s’empêcher de le comparer avec celui du dessous. Elle s’y sentait
beaucoup plus à l’aise depuis qu’elle venait prodiguer les soins à sa patiente. Elle connaissait
les habitudes de la maison et prenait des initiatives, elle préparait le café, recherchait les
médicaments dans le tiroir de la commode avant de se rincer les mains dans la salle de bain.
Le café servi, les deux femmes se trouvaient assises, face à face dans la chambre du fond,
Jeanne ne pouvait s’empêcher de questionner madame Boisson sur la locataire du dessous.
- « Oh vous savez, il n’y a plus personne au 4 ème depuis que madame Julie est décédée,
elle était bien vieille elle avoisinait les cent ans, cela fait maintenant deux ans que
l’appartement est vide. »
Machinalement Jeanne regarda sa montre qui indiquait 09h10, surprise, elle regarda
la pendule qui affichait la même heure. Comment cela pouvait-il se produire alors qu’à la
même heure elle se trouvait avec Julie entrain de bavarder. Madame Boisson continuait à
évoquer la vie de sa voisine :
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