Page 99 - affiche-plume-2020.indd
P. 99
inéluctables de la fin de vie. Une immense lassitude s’empara d’elle. La voix aigre de
Paulette interrompu cet instant de flottement.
- Ça vient ? On vous paye pourquoi au juste ?
Héloïse se leva lourdement, s’engouffra dans le couloir tapissé d’un papier
dont les fleurs semblaient fanées. Elle se demanda si elle avait soigné autant de
personnes qu’on pouvait compter de fleur sur ces murs. Plus étonnant, cette idée ne
provoqua en elle aucune émotion, si ce n’est une sensation d’écœurement. Était-ce
la perspective de tous ces corps qu’il lui restait à laver ? Ces interstices dans les
chairs qu’il ne faudrait pas oublier ? Ces cheveux fins et gras qu’elle devrait
inlassablement peigner ? Ou bien ces verres d’eau qu’elle remplissait
inéluctablement, qui lui revenaient toujours vides et qu’elle remplissait à nouveau ?
Et tout ces postes de télévision dont il fallait, chaque jour, régler le volume… Les
yeux croutés et sans éclat, où elle laissait tomber ses gouttes. Ces innombrables
aiguilles qu’il lui restait à enfoncer dans des peaux sans couleurs. Et toujours, la fin.
Une envie irrépressible d’échapper à toutes ces fleurs qui lui donnaient le tournis
s’empara d’elle.
Sortant du couloir, elle eut juste le temps d’apercevoir de la fenêtre de la chambre de
Paulette, une femme blonde vêtue d’un blaser rouge s’engouffrer dans le parking de
la résidence et se diriger vers l’entrée. Héloïse se posta devant le lit de la vieille, sorti
le revolver et tira.
4