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ressortit quelques minutes plus tard. Elle ne s’était pas faite engueuler comme ça depuis

            longtemps. Selon le point de vue de sa supérieure, elle avait outrepassé ses fonctions et
            discrédité le médecin devant les internes. Elle avait intérêt à ne pas recommencer, sous

            peine d’être sanctionnée. Marie ne contesta pas ce qui lui était reproché. A quoi bon ? Elle
            avait conscience des rouages qui assuraient le fonctionnement d’un hôpital et du sort que

            l’administration réservait à tout grain de sable qui viendrait perturber son fonctionnement.
            Malgré la certitude de son avis sur la santé du patient, elle ne pouvait que baisser la tête

            et rentrer dans le rang. De retour chez elle, épuisée par cette journée de travail, émue par

            l’injustice dont elle faisait l’objet, elle avala le contenu d’une boite de conserve vaguement
            réchauffée au micro-ondes et s’endormit sur le canapé. Quelque part au milieu de la nuit,

            elle fût réveillée par des cris en provenance de l’appartement mitoyen. Encore ce salaud
            qui tape sur sa femme, se dit-elle en frissonnant. Elle avait plusieurs fois appelé la police

            qui était intervenue pour le calmer, ce qui fonctionnait quelque temps. Puis il
            recommençait  à s’acharner sur cette  pauvre  femme. Marie se traina jusqu’à son lit, se

            blotti sous la couette et pleura à chaudes larmes jusqu’à sombrer dans le néant.

            Lorsqu’elle se réveilla aux aurores, son sommeil brutalement interrompu par la sonnerie
            du réveil, elle mit du temps à émerger. Une douche rapide chassa vaguement les brumes

            de sa léthargie.  Elle  prit quand  même le  temps  de réchauffer un  peu  de  café. Tout en

            l’avalant par petites gorgées, elle ouvrit son cahier magique. Elle avait décidé de l’appeler
            comme ça, en  attendant de découvrir ce qu’il était vraiment. Le  silence  était  total  dans

            l’immeuble, à cette heure matinale. Elle ferma les yeux, lâcha prise, sentit son corps entier
            s’harmoniser avec l’univers et, quand son stylo lui glissa des doigts, elle prit connaissance

            des noms qui se trouvaient couchés sur la page du jour. Son dernier patient du matin, la
            veille écrit en bleu, apparaissait en rouge, tandis que celui de la 212 était saisi en noir.

            Tous les autres étaient en vert. Un message de Chloé, sa meilleure amie, s’afficha sur son

            téléphone. Elle lui proposait de manger ensemble ce midi. Marie accepta avec plaisir. Cela
            lui ferait du bien de bavarder avec quelqu’un de confiance à qui elle pourrait se confier.

            Sa tournée  du  matin  se déroula sans  encombre jusqu’à la  dernière visite. La plaie qui
            s’était infectée hier continuait de suppurer. L’odeur qui en émanait trahissait l’aggravation

            de l’infection. Marie appela directement la fille de la patiente pour l’informer de l’évolution
            inquiétante de la situation et lui conseilla de faire venir de toute urgence un médecin. Puis

            elle sauta dans sa voiture et fila rejoindre Chloé à la terrasse d’un petit restaurant. Elle

            s’excusa pour son retard et se laissa tomber sur le siège en soupirant longuement.
              -  Tu vas bien Marie ? Tu as une tête d’enterrement. Cela fait quinze jours que j’essaie

                  de te contacter pour qu’on se voit. Je m’inquiète beaucoup pour toi, tu sais ?
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