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Marie ouvrit la fenêtre et tenta en vain d’attirer son attention.
- Elle se nomme Solange ; faites vite.
- Solange ! Eh Solange. SOLAAAANGE !!!
La jeune femme s’arrêta et leva la tête. Marie se sentit ridicule. Elle fit un signe de la main
auquel lui répondit la jeune femme. Soudain, dans un crissement strident de pneus, une
grosse berline surgit d’une rue adjacente et traversa à vive allure le carrefour. Marie se
figea, sidérée. Que ce serait-il passé si elle n’avait pas interrompu la marche de cette
femme ? Aurait-elle été renversée, elle et son bébé ? Elle referma la fenêtre et fit face à
l’inconnue.
- Comment avez-vous su ? Comment saviez-vous son prénom ? Et le mien ?
Comment…
- Asseyez-vous donc un moment, je vais vous expliquer. J’ai tout simplement pris
connaissance de cette situation dans mon cahier de vie.
- Ceci est impossible. Cela dépasse l’entendement !
- Je comprends votre désarroi. Voyez-vous, chaque matin, je prends un peu de temps
pour faire le vide en moi, j’ouvre ce cahier et j’écris des évènements. Ensuite, je
décide d’intervenir ou pas. Essayez avec le vôtre, qu’est-ce que vous risquez ?
Marie ne savait pas quoi faire. Elle ne maîtrisait pas les évènements, ce qui la mettait très
mal à l’aise. Néanmoins, elle prit son stylo bille, ouvrit le cahier, ferma les yeux et respira
profondément. Elle laissa ses pensées parasites s’effilocher et ses émotions se taire. Du
plus profond de sa conscience, un léger souffle de vie naquit puis la traversa. Elle perçut
un flot de vibrations colorées surgir autour d’elle puis s’enrouler autour de son corps
jusqu’à sa main droite. Quand elle ouvrit les yeux, elle se sentit apaisée, sereine.
L’inconnue lui souriait doucement. En regardant son cahier, elle se crispa. Des mots
avaient été écrits sur la première page. Elle ne se souvenait pas de l’avoir fait. Elle y lut les
noms des patients auxquels elle devait rendre visite ce matin. Ils étaient écrits en vert,
sauf le dernier, en bleu. Elle releva la tête. L’inconnue la fixait sans aucune once de
surprise dans son regard.
- C’est moi qui ait écrit ces noms ? Pourquoi ? Ils ne sont pas tous de la même couleur,
comment est-ce possible ?
- Marie, je ne sais pas ce que cela signifie. Chaque cahier est unique. Il n’y a pas de
mode d’emploi. C’est à vous de le découvrir. Je crois maintenant qu’il est temps pour
vous d’aller voir votre patiente du dessus.
Comme un automate, Marie se leva, sortit de l’appartement, monta jusqu’au 5 étage et
e
frappa à la porte de gauche. Machinalement elle consulta sa montre. Elle avait quitté sa
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