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- … Quand ?
               - Il y a deux semaines. Je ne savais pas que vous connaissez Marise. On n’était pas très proche

               elle et moi. Pourtant ça faisait presque cinquante longues années qu’on était voisines. Elle
               était discrète, effacée. Elle était tellement seule qu’on ne savait plus comment se rapprocher

               d’elle. Je ne savais même pas qu’elle demandait vos services.

               - Non, vous vous trompez, Madame De Palmas n’était pas ma cliente.
               - Elle n’était pas vraiment mon amie, certes, mais comment dire, elle faisait partie de mon

               décor, mon paysage de tous les jours. La personne qui était toujours dans ma vision n’est plus
               là. Sa disparition est affreusement déstabilisante pour moi.

                      En quittant le 5ème étage, Cécile chercha le concierge. L’homme d’abord regarda
               l’esthéticienne avec des yeux où se lisait l’étonnement. Ainsi une jeune femme s’intéressait au

               cas d’une vieille habitante décédée. Puis il raconta :

               - C’est l’aide-ménagère qui m’a contacté, après avoir découvert que Madame De Palmas était
               immobile dans son lit. Vous savez, elle avait une fortune considérable, mais personne n’en

               aurait voulu contre la vie qu’elle avait ! Oh que non ! Elle avait hérité de ses parents à vingt

               ans, elle était déjà orpheline. Avec son mari, ils avaient un fils. Leur fils unique est mort jeune
               après une longue maladie. Son mari était un homme bien, mais lui aussi a quitté ce monde

               avant la retraite. Pauvre Madame De Palmas, elle n’avait pas de famille.
               Il soupira avant de poursuivre.

               - Son héritage colossal devait entièrement aller à son neveu. Madame Marise n’avait pas de
               frère ni sœur, en fait c’est le neveu de son mari défunt. Mais vous savez quoi, deux jours

               avant sa mort, Madame De Palmas avait fait rectifier son testament. Les trois quarts de

               l’argent vont à une association. C’est une association qui se bat contre une maladie…, du nom
               trop compliqué à retenir, d’ailleurs c’est la maladie qui a pris la vie de son fils. Madame De

               Palmas a fait un énorme don pour relancer la recherche. Elle a demandé que le jour où le
               traitement efficace serait trouvé le nom de son fils figure sur l’institut de recherche. C’est

               beau tout ça, mais quand même bien triste.
               - De quoi est-elle morte, en fait ?

               - On ne sait pas trop. Le médecin pense que c’est le cœur qui a dû lâcher.

               Cécile s’apprêtait à quitter le bâtiment en remerciement le concierge de son récit.
               Il la regarda, puis avec l’air absent, finit par dire :

               - Vous savez, Mademoiselle, j’ai vu des morts. Beaucoup. C’est le cours normal des choses

               dans la vie, mais c’est chaque fois effrayant. Pour Madame De Palmas, c’était bien différent,
               elle était étrangement sereine. Ça m’a impressionné donc je ne l’oublierai pas. Ça vous

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