Page 116 - affiche-plume-2020.indd
P. 116

N° 20          Le fantôme de la Corniche




               Elle avait eu maintes fois l'occasion d'être appelée pour des soins urgents au 32, avenue du
               manoir, 5ème étage, porte gauche. Mais ce matin là, fatiguée par une nuit d'insomnie, elle
               s'arrêta au 4ème étage, et frappa porte gauche. A peine s'était-elle aperçue de son erreur,
               qu'une voix résonna dans la pièce du fond :
               « Enfin ! Je vous attendais ».


               Elle avança dans la pièce spacieuse après avoir franchi un vestibule qui permettait d’isoler la
               chambre du long couloir. Elle trouva un vieux monsieur au visage buriné assis sur un fauteuil

               roulant un plaid écossais sur les genoux. Le regard d’Adèle fit le tour de la pièce, celle-ci, à
               part le lit médicalisé qui trônait dans une alcôve,  était richement meublée de ce qui pouvait

               être des  souvenirs de voyages. Le vieil homme lui souriait et d’un geste l’invita à s’assoir sur

               un sofa qui se trouvait en face de lui.
               « Entrez, entrez, Madame, je vous attendais !

               Cependant Adèle resta debout.
               « Veuillez m’excuser, cher Monsieur, je me suis trompée d’étage. Ce n’est pas avec vous que

               j’ai rendez-vous.
               « C’est avec Madame…

               Elle s’arrêta net, elle se devait de plus de retenue, en aucun cas, elle ne devait dévoiler

               l’identité des personnes à qui elle apportait des soins.
               « Non, non, chère Madame, vous ne vous êtes pas trompée. »

               « Vous avez besoin de soins, Monsieur ? Vous recherchez une infirmière ? Je peux vous en
               enseigner une si vous le désirez «

               « C’est vous que je souhaite voir, Adèle  »

               Adèle sursauta : comment cet homme connaissait-il son prénom ?
               « Je n’ai pas besoin de soins !... J’ai besoin de vous !...

               « Allez, asseyez-vous devant moi que je vous regarde. »
               Il vit bien qu’Adèle hésitait

               « Madame N’Guyen peut  attendre, croyez-moi !... »

               Que voulait-il dire par là ? Et comment savait-il qu’elle était l’infirmière de la personne qui
               demeurait à l’étage juste au dessus. Cela faisait plusieurs années qu’elle officiait en ce lieu et

               elle pouvait certifier que jamais elle n’avait pu entendre la moindre conversation, les murs de
               granit étaient les garants des secrets les mieux gardés. Et ce monsieur qui semblait connaitre

               tout le monde, elle ne l’avait jamais vu ni rencontré dans quelqu’endroit qui fut.



                                                            1
   111   112   113   114   115   116   117   118   119   120   121