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j’avais en moi, illumine mon salon. Je suis contente que vous ayez pris cette forme. C’est un
               cadeau pour moi.

               - Vous ne mangez pas ? Vous n’avez sans doute pas faim. Mademoiselle, je suis prête. Je suis
               prête depuis si longtemps. Quel plaisir que vous soyez venue pour moi en ce début de

               printemps. La saison se réveille tout doucement ces derniers jours. Vous voyez, depuis ma

               fenêtre on voit des cerisiers en fleur de l’avenue. Le parfum de fleurs n’arrive pas jusqu’ici,
               mais mes yeux sont enchantés pour ces couleurs. Mon seul regret, c’est le magnolia. Vous

               voyez ses bourgeons ? Dans trois jours ça sera l'éclosion. Les magnolias en fleurs, ah je vous
               assure Mademoiselle, c’est l’une des merveilles de cette terre. Les fleurs grandes comme

               paume de main, pétales blanc rosé, leur floraison m’éblouit chaque année. Les fleurs de
               magnolia laissent apercevoir les endroits au-delà des rêves. Ces pétales, avec ses couleurs

               tellement fines, me font voyager ailleurs, ailleurs qui n’est plus de ce monde. Devant cette

               luxuriance, mon vieux cœur s’enflamme chaque fois. J’aurais voulu voir ce sublime spectacle
               pour la dernière fois. …Mais au fond, cela n’est plus important, vous le savez. Voilà, ainsi je

               suis prête. Maintenant, emmenez-moi, je vous prie.

                      Marise De Palmas regarda Cécile avec des yeux si expressifs que la jeune femme
               ressentit la pression montée. Où suis-je ? se demanda-t-elle enfin. Je suis dans une zone à

               dimension anormale, il faut fuir. Elle réussit enfin à dénouer sa gorge pour prononcer.
               - Madame De Palmas, … je ne comprends pas du tout de quoi vous parlez. Je suis venue voir

               votre voisine du dessus, mais me suis trompée d’étage. Je ne m’explique pas pourquoi je suis
               entrée chez vous. Je ne suis pas la personne que vous attendez.

               - Si, vous l’êtes.

               - Non, non, ce n’est pas moi. Je m’appelle Cécile Pelletier. J’effectue des soins du visage.
               Madame Mariotti me demande, donc ce n’est pas moi que vous attendiez.

               - Si c’est vous.
               - Madame, je travaille pour votre voisine. Madame Mariotti, que vous connaissez

               certainement. Elle est magnifique, n’est-ce pas ? Elle fait jeune pour son âge. C’est d’une part
               grâce à mes mains. Vous savez, Madame Mariotti n’hésite pas à parler de moi, elle a fait

               considérablement grandir ma clientèle. Alors évidemment ce n’est pas moi que vous deviez

               voir.
               - Si vous êtes…

               -…Pourquoi insistez-vous ?

               - Parce que c’est vous que j’attendais aujourd’hui. Je savais que vous viendriez, et vous voilà.
               - Non.

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