Page 117 - affiche-plume-2020.indd
P. 117
-Monsieur… Heu !... comment puis-je vous appeler ?
-Est-ce important ?
Adèle était de plus en plus décontenancée …
-Pourquoi, Monsieur qui n’a pas de nom, pourquoi m’avez-vous dit que madame N’Guyen
pouvait attendre ?
-Parce qu’elle est morte, chère enfant !...
La jeune infirmière resta interloquée ; sa patiente était décédée dans la nuit et comment ce
vieux mécréant pouvait-il le savoir ?
Après avoir jaugé la réaction d’Adèle, l’homme reprit :
-Asseyez-vous maintenant, vous n’êtes plus pressée.
Adèle jugea que c’était plutôt déplacé comme réflexion pourtant elle obéit, elle s’assit.
Elle se tenait gauchement les fesses posées sur le bord du fauteuil, sa trousse de soins sur les
genoux attendant que l’homme prît la parole. Voyant qu’il n’en faisant rien, elle se décida à
déposer sa trousse à ses pieds et le temps qu’elle lisse les plis de sa robe et qu’elle relève la
tête, le vieil homme s’était endormi.
Elle se racla la gorge tentant de l’éveiller mais l’homme piquait du nez vers sa poitrine la tête
légèrement de travers alors Adèle se releva pour partir cependant une photo posée sur le
marbre de la cheminée attira son attention. Il y avait la même dans l’appartement de Madame
N’Guyen ; Le cliché représentait sa patiente lorsqu’elle était jeune et à côté d’elle, posait un
homme, jeune aussi, coiffé d’un chapeau pointu comme en portent les asiatiques pour se
protéger du soleil, cependant désormais elle pouvait mettre un nom sur ce visage, non pas un
nom puisque l’homme endormi n’avait pas daigné lui dévoiler son identité cependant c’était
lui, elle en était certaine.
Les très beaux volumes de cette ancienne demeure de négociants-armateurs construite à la fin
du XVIII ème siècle avait permis d’en faire une résidence pour personnes âgées huppées et les
travaux engagés, modernisation et insonorisation, en faisaient un endroit des plus discrets qui
soit. Les résidents étaient fortunés ce qui n’empêchait pas qu’ils méritaient autant de soins et
d’attention que n’importe quel patient malade et âgé.
Elle aimait se rendre en ce lieu, les locataires de cette solide demeure avait toujours des
histoires extraordinaires à lui narrer. Cependant elle se rendait compte, maintenant, que
madame N’Guyen bien qu’elle s’épanchât volontiers sur ses souvenirs, lui avait tu pas mal de
secrets.
2