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qu'ils avaient enfourchée d'un même mouvement, avant de démarrer l'engin et de se mettre en route

            en le faisant pétarader.
            Ils roulaient depuis déjà un moment sur une route de campagne, s'enivrant de vitesse et appréciant

            la caresse du vent sur leurs visages et dans leurs cheveux, lorsque Paul avait soudain freiné, puis
            stoppé en déclarant :

            « On dirait qu'il y a une voiture en panne ! Reste là, je vais voir si je peux aider. »
            « Pourquoi ne veux-tu pas que je t'accompagne, Paul ? »

            « Par prudence, Esther.  On ne sait jamais,  ce pourrait être un leurre pour détrousser les gens

            compatissants qui viennent aider les automobilistes soi-disant en panne. »
            « Sois prudent, alors. »

            Il lui avait répondu par un sourire et un baiser, puis avait couru vers la voiture arrêtée à quelques
            mètres de là, tandis que la jeune fille restait sur la moto. Saisie d'une soudaine intuition, elle avait

            machinalement noté le numéro d'immatriculation de l'automobile sur sa main, puis s'était plongée
            dans la contemplation du paysage. Le bruit d'une altercation l'avait alertée. Elle avait tourné la tête

            vers la voiture et s'était inquiétée de voir Paul qui semblait plongé dans une discussion animée avec

            le propriétaire du véhicule en panne. Ne sachant pas conduire la moto de son fiancé, Esther en était
            descendue en hâte et, au moment où elle avait pris sa course pour parcourir les quelques mètres qui

            les séparaient et rejoindre les deux hommes, une double détonation avait retenti et elle avait vu avec

            horreur son compagnon s'effondrer sur le sol, tandis que l'auto démarrait et s'éloignait en trombe.
            Esther s'était précipitée et avait poussé un long hurlement en découvrant l'homme qu'elle aimait

            étendu sur le sol, une large tache de sang s'étalant sur sa poitrine. Agenouillée auprès de lui, elle
            avait tenté de le ranimer sans pouvoir retenir ses larmes. Il avait ouvert les yeux et avait murmuré

            avec difficulté :
            « J'aurais dû...me méfier...du...vendredi 13...Pardon...chérie... »

            Puis, le malheureux avait expiré, au grand désespoir de la jeune fille...

            Au terme d'une enquête de plusieurs mois et grâce au numéro d'immatriculation‒faux,
            cependant‒fourni  par  Esther,  l'assassin  de  Paul  avait  été  appréhendé et  condamné à purger une

            lourde peine de prison dans un pénitencier proche de la frontière mexicaine...


                   Essuyant rageusement les larmes qui coulaient sur ses joues, Esther se leva vivement, ôta
            rapidement sa robe et tendit la main vers son tailleur bleu, puis se ravisa en songeant :

            « Non ! Qui qu'il soit, je ne lui ferai pas le plaisir de lui obéir ! »

            Elle opta donc pour un col roulé bordeaux, un pantalon noir et une veste à capuche, noire également,
            consulta sa montre, puis alla passer un coup  de fil. Lorsqu'elle obtint sa communication, elle

            s'adressa à son interlocuteur :

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