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Elle se retrouva enfin sur le deck, les fesses (qu’elle avait fait regalber il y a deux ans
               pour un prix avoisinant le Pib annuel du Honduras) mal dissimulées par un lambeau
               de maillot. Elle chercha longuement sa clé puis, alors qu’elle la trouvait enfin, ce
               maudit « vendredi 13 » la lui fit lâcher et elle la vit disparaitre entre deux lattes du
               deck. Francine fut tentée de hurler à la mort afin de faire accourir Benoit mais se
               souvint qu’il ne rentrerait pas de Paris avant trois jours : Paris où il s’était rendu pour
               se faire blanchir les dents et prendre possession de sa nouvelle décapotable (dont la
               consommation aux cent kilomètres approchait la production quotidienne de pétrole
               du Vénézuela). De nombreuses tentatives furent nécessaires afin de récupérer la clé
               et de pouvoir enfin entrer. Lorsque Francine constata qu’il n’était pas possible de
               prendre une douche puisqu’il n’y avait plus d’eau, elle ravala un sanglot et décida
               d’aller se coucher immédiatement afin de ne plus rien subir ce vendredi 13.


               Si sa nuit fut agitée, elle ne le raconta à personne : Lucie, la première de la cour à
               ouvrir ses volets le lendemain, la vit sortir portant un immense turban que n’aurait
               pas renié une « Madame Irma » de cirque itinérant et s’engouffrer dans un taxi dont
               le chauffeur venait de remplir le coffre de valises.

               Quelques mois plus tard, Lucie lança une invitation aux habitants de la cour : il
               s’agissait d’accueillir les nouveaux venus, propriétaires de l’ancienne maison de
               Francine.

               Alors que les invités, repus et forts gais, dégustaient le merveilleux lambig de Lucie,
               Anne, la nouvelle venue leur raconta comment ils avaient fait l’acquisition de la
               maison.

               -Nous vivions depuis longtemps à l’étranger, Trémeur venait de prendre sa retraite et
               nous désirions revenir nous installer en Bretagne et particulièrement à Lesconil
               lorsque notre fille nous a fait part de vos problèmes de voisinage. Nous avions jeté
               notre dévolu sur cette maison depuis fort longtemps et étions désolés de n’avoir pu
               nous porter acquéreurs avant Francine.

               -C’est devenu notre feuilleton hebdomadaire : chaque fois que nous parlions à notre
               fille, elle nous faisait part des derniers développements de l’affaire, ajouta Trémeur
               son mari. Elle est bien placée, elle habite rue de Paris et rien ne lui échappe. C’est
               pour cela que nous avons décidé de vous (et de nous) aider un peu…


               Voyant la surprise se peindre sur le visage de Lucie, Anne ajouta : cette femme est
               tellement narcissique que je suis allée voir sur les réseaux sociaux et ai facilement
               trouvé sa trace. Il m’a alors suffi de la menacer, par courriel, de rendre publiques
               certaines images compromettantes tournées par sa propre caméra de surveillance
               ce fameux vendredi 13. C’est Trémeur qui l’avait piratée…avoir un mari ingénieur
               comporte des avantages !

               -La morale de cette histoire pourrait bien être que l’union fait la force, conclut Lucie.
               Mon intervention et mes champignons hallucinogènes n’auraient peut-être pas été


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