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qu’elle effectuait pour le compte d’une grande banque, elle se sentait parfois dépassée,
comme les services sociaux se plaisaient régulièrement à le lui rappeler. Elle referma la porte
sur la promesse de monter à l’étage demander à Dylan d’arrêter la musique.
Elle savait son fils, livré de temps en temps à lui-même, mais n’avait pas les moyens
de faire autrement. Le père de son enfant avait préféré se faire oublier lorsqu’elle lui avait
annoncé sa grossesse. L’amoureux transi avait expliqué qu’il ne se sentait pas prêt à devenir
père. Il ne s’était pas interrogé un seul instant, pour savoir si Pauline se sentait, elle, prête à
devenir mère. Depuis Pauline alternait CDD de quelques heures, intérim et petits boulots sans
qualification précise. Trouver du temps pour se consacrer à l’éducation de son enfant était un
luxe qu’elle ne pouvait se permettre. La priorité était de remplir le réfrigérateur et de payer le
loyer.
Avant que Monsieur Tatillon ne revienne sonner une troisième fois, Pauline décida de
grimper l’escalier pour tenter de faire redescendre le volume sonore à un niveau acceptable.
En entrant dans la chambre de son fils, elle fut très surprise. Il n’y avait personne ! La
pièce n’était pourtant pas si grande et il n’y avait pas d’endroit où un adolescent aurait pu se
cacher. Sur le mur du fond, au-dessus du bureau, la mini chaine tremblait, imprimant à
l’étagère un mouvement de va et vient qui menaçait de la faire tomber.
- Dylan ! Dylan ? appela Pauline.
Seul le silence lui répondit.
Légèrement inquiète, Pauline redescendit, cherchant dans les autres pièces de la
maison. Elle ne trouva rien dans le salon. Aucune présence ne se manifesta dans la salle de
bains. Dans le garage non plus, il n’y avait personne. Ou était-il passé ? L’absence, voire la
disparition soudaine de son fils, parti en laissant la musique à fond, n’était pas habituelle, ni
normale. Dans la remise, au fond du jardin, qui servait de garage, le vélo de Dylan était posé
contre une cloison, à sa place, ce qui voulait dire qu’il était bien rentré du collège et pas
encore ressorti, ou alors à pied. Pauline commença à s’inquiéter. Elle sortit dans l’impasse et
se rendit chez Blandine. Celle-ci fut bien incapable de lui donner quelque renseignement que
ce soit. Sa vue baissait tellement qu’elle n’arrivait plus à reconnaitre les arbres derrière ses
fenêtres. Elle ne distinguait que des ombres. Parfois, elle discutait avec le Président Chirac,
mort depuis trois ans, qui se promenait dans l’impasse, lui reprochant d’avoir construit une
pyramide en verre dans la cour du Louvre. Selon Blandine, la perspective, depuis la Cour
carrée, en était gâchée. Pauline la laissa à ses illusions, salua le Président Chirac et Blandine,
et rentra chez elle.
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