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N° 13 Un long voyage en train
Elle attendait sur le quai. Elle repensait aux derniers jours passés avec celles qu’elle avait
considérées comme ses amies. Un malaise persistait en elle.
Ses pensées furent interrompues par l’arrivée du train.
La porte s’ouvrit, elle mit un pied sur la première marche, leva la tête et s’arrêta
brusquement.
Ce n’était pas son train. Du moins pas celui dont elle avait l’habitude. L’intérieur ne
ressemblait d’ailleurs à aucun autre qu’elle ait connue au cours de sa vie.
Elle voulut reculer mais se heurta à un mur invisible, apparu sans qu’elle ne l’ait remarqué.
Cette situation lui paraissait incompréhensible. Elle fut brusquement propulsée à l’intérieur
du train par une espèce de force seulement perceptible.
Sans qu’elle ne sache pourquoi, tout ceci lui était étrangement familier. De légers bruits
parasites se faisaient entendre, provenant de partout et de nulle part à la fois.
Elle frissonnait, mais ne savait pas si c’était à cause du froid qu’elle avait ressenti en
attendant le train ou si c’était une manifestation de sa peur.
Le train se mit en marche, roulant de plus en plus vite, la faisant tomber à genoux. Des
ombres dansaient sur les reflets des vitres. Elle ne voyait rien à l’extérieur, seule l’obscurité
pénétrait le train.
Elle se leva, presque automatiquement, et commença à traverser le wagon. Les secondes qui
s’écoulaient semblaient durer des heures tant elle était effrayée.
Et malgré cela, comme s’il allait s’envoler, le train avançait à une vitesse folle. Sa tête
tournait, elle était au bord de l’évanouissement.
Soudain, les bruits s’amplifièrent, jusqu’à devenir assourdissants. Elle se bouchait les oreilles
mais rien n’y faisait.
Elle ressentit une douleur intense qui la fit de nouveau tomber à genoux. Tout autour d’elle se
brouillait, le son et l’image se mélangeaient dans une valse endiablée ne provoquant que
souffrance.
Soudain, tout s’arrêta. Le silence s’installa, presque plus assourdissant que les bruits
précédents. Elle était toujours au sol, trop choquée pour faire quoi que ce soit.
Quelle était donc cette impression, comme si l’on pouvait sentir la moindre particule d’un
espace alentour. La peur ? L’excitation ? Le soulagement ?
Pour elle, c’était comparable au fait que son esprit se détachait de ce qu’elle ressentait
mentalement et physiquement pour se fondre avec l’atmosphère du train.
Quand elle eut enfin la force de se lever, les lumières se mirent à clignoter, comme si elles
essayaient de faire passer un message.
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