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N° 11
Joe
Elle attendait sur le quai. Elle repensait aux derniers jours passés avec celles qu’elle
avait considérées comme ses amies. Un malaise persistait en elle. Ses pensées furent
interrompues par l’arrivée du train. La porte s’ouvrit, elle mit un pied sur la première marche,
leva la tête et s’arrêta brusquement. C’est lui, de dos sur la plateforme, j’en suis sûr ! Elle
recula d’un pas.
Il y a un mois, Sophie avait appelé Mathilde pour lui proposer de venir chez ses parents
à Tende. Elle y organisait un week-end de retrouvailles. Martine et Juliette, leurs amies
d’enfance, seraient là.
À l’adolescence, elles venaient chaque week-end dans cette belle demeure qui domine
la vallée. Mais, l’année de ses vingt ans, Mathilde avait décidé de mettre un peu de distance.
Après la disparition de billets dans le porte-monnaie de Juliette, elle avait été soupçonnée
sans preuve. Cet incident avait cassé leur complicité, chacune surveillant l’autre sans le
dire. Un emploi du temps chargé lié à ses études de droit avait servi de prétexte pour arrêter,
pour un temps au moins, les escapades du week-end. Diplôme en poche, elle avait intégré
la cour d’assises des Bouches-du-Rhône et avait emménagé à Aix-en-Provence. Elle n’était
plus revenue à Tende.
Les semaines étaient toujours aussi chargées, mais la proposition de Sophie tombait à
pic, le vendredi 4 juin, il n’y avait rien de prévu. Heureuse de revoir ses amies, elle avait
immédiatement répondu oui.
Il faisait beau, elle décida de voyager léger : quelques affaires dans son petit sac à dos,
un maillot de bain et une serviette pour la piscine. À l’époque, Mathilde et ses amies y
passaient des heures : prendre un maillot de bain était juste essentiel !
Mathilde fit le trajet en voiture d’Aix à Nice, l’autoroute était fluide. Craignant la conduite
sur les petites routes de montagne, elle déposa sa voiture au parking de la gare
routière pour prendre l’autocar qui faisait la liaison entre Nice et Tende : « Toujours le car à
l’aller et le train au retour, ça fait deux fois plus de paysages ! », disait le père de Sophie.
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