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La question faisait écho à une autre, prononcée par Mathieu, quelques jours plus tôt,
d’autant plus que sa formulation était insolite, et similaire. Qui s’exprimait ainsi de nos jours ?
La première réponse, instinctive de Céline, une main posée sur la poignée de sa valise
et l’œil rivé sur la pendule de la gare, avait été :
— Oui, bien sûr, je suis aussi certaine de lui qu’il l’est de moi.
Mais ça, c’était avant. Quelques minutes plus tôt. Quand elle croyait encore en son
couple. Quand elle s’émerveillait certains matins de trouver cet homme si beau dans son lit et
de le voir lui sourire avant de se lever pour partir vers son travail, ou s’éloigner quelques jours
avant de revenir vers elle.
Dès le début de leur relation, il avait décidé d’être « honnête » et l’avait informée qu’il
avait un métier particulier.
— Je travaille dans le renseignement, avait précisé Mathieu. Je ne te dirais rien de plus.
Secret d’Etat. Ne pose pas de questions. De toute manière, je ne te répondrais pas. Et puis
moins tu en sais, mieux cela vaut. Je ne voudrais pas te mettre en danger. Il est possible qu’un
jour tu ne me vois plus revenir, mais tant que je suis là, nous profiterons ensemble du temps
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que nous avons.
— Mais… avait commencé Céline, avant de se taire. C’est bon, je t’accepte tel que tu
es.
Les mots qui avaient franchi ses lèvres lui avaient été imposés. Au fond d’elle, Céline
ne les pensait pas vraiment. La déclaration de Mathieu avait été si soudaine, si brutale, qu’elle
n’avait pas su quoi répondre. La phrase était venue sans qu’elle ne le veuille. La seule chose
qu’elle désirait, c’était garder auprès d’elle ce superbe garçon, que toutes ses amies lui
enviaient.
Afin d’éprouver sa volonté, Mathieu avait aussitôt ajouté :
— Si cela ne te convient pas, on peut s’arrêter là.
— Certainement pas ! avait répondu Céline. C’est hors de question !
— Nous sommes bien d’accord, avait insisté Mathieu, tu ne pourras jamais m’avoir
pour toi toute seule. Il te faudra me partager avec mon métier, sachant qu’il demeurera
toujours une priorité.
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