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Voilà, se dit Sandrine Mercier, j’ai tous les éléments à ma disposition et je pense que
l’une des quatre filles a menti et devait en vouloir terriblement à Suzon pour la tuer, mais
qui est-ce ? La journée se passa en investigations diverses, les jeunes femmes n’ayant
pas le droit de rentrer chez elles, elles s’occupèrent comme elle le purent, sans chercher
d’empathie chez l’une ou l’autre soupçonnée de crime. Le Club des Cinq était mort
désormais, finie la joyeuse bande de copines, place au chacun pour soi. Ce n’est que le
lendemain que la Gendarmerie autorisa les jeunes femmes à regagner leurs pénates en
restant, quand même, à la disposition de l’enquête. Restée seule au gîte, La Capitaine
retourna dans les chambres, dans la cuisine, dans la salle de bain, elle inspecta de
nouveau les abords du gîte jusqu’à l’étang à la recherche d’un petit indice, puis décrocha
les photos du fil à linge et entreprit de les étudier minutieusement, assise dans le transat.
Elle en saurait sans doute un peu plus sur ces amies de lycée. Ce qui la surprit tout de
suite était que le Club des Cinq semblait avoir été le Club des Six pendant des années.
Que s’était-il donc passé ? Qui était cette sixième copine, jolie blonde aux yeux verts, qui
riait tout le temps sur les photos ? Fallait-il réinterroger les copines au risque d’alarmer la
criminelle ? Sandrine Mercier allait plutôt se rendre à leur ancien lycée, peut-être certains
professeurs pourraient-ils l’éclairer sur le passé !
Sous le visa de leur chef d’établissement, deux professeurs acceptèrent de discuter
avec la Capitaine de Gendarmerie : effectivement, il y avait bien, au départ du Club, six
copines qui s’étaient connues en classe de Seconde et s’étaient suivies jusqu’en
Terminale. Très liées, elles s’entendaient à merveille et se retrouvaient souvent pour de
nombreuses activités, mais un malheur était arrivé avant les épreuves du Bac : Jeanne
(c’était son prénom) avait été retrouvée poignardée et noyée dans l’ Elorn, un sac poubelle
autour de la tête, mais l’enquête n’avait jamais trouvé le coupable. La Police avait invoqué
une mauvaise rencontre et c’était tout. La Capitaine fit tout de suite le rapprochement avec
le cas de Suzon, tuée puis asphyxiée dans l’eau. Les cinq copines, complètement
dévastées par le drame, avaient continué, malgré tout, à rester unies jusqu’à aujourd’hui.
Un des professeurs ajouta que les rumeurs de l’époque disaient que Jeanne aimait
l’intimité des filles et que peut-être l’une d’entre elles lui en aurait voulu de quelque
chose… Sandrine Mercier sortit du lycée convaincue du lien entre les deux noyades, mais
comment l’expliquer ? Pour la Gendarme, l’une des cinq copines aurait assassiné la jeune
lycéenne pour une histoire d’adultère et une autre, ayant soudainement compris la
situation et le mobile du meurtre de Jeanne, aurait voulu des explications sur ce qui s’était
passé à l’époque. La confrontation aurait alors dégénéré jusqu’à reproduire le même
mode opératoire. Si pendant cinq ans, rien ne s’était passé au sein du groupe, c’est que la
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