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Quitter le monde de l’ovalie est plus difficile à accepter. Elle n’était pas des meilleures
joueuses, mais elle était aimée pour son implication, sa capacité à motiver l’équipe et sa
bonne humeur jusque tard lors des nuits qui se terminaient en discothèque. Ces soirs là, elle
trinquait avec celui qu’elle aimait. Quelques fois, ils dansaient ensemble mais elle n’avait pas
eu encore l’occasion de se serrer contre lui. Le soir, dans son lit, avant de s’endormir, elle
revivait ces moments de bonheur, mais bien sûr avec quelques améliorations, coté affectif.
Elle pouvait s’en donner à cœur joie car personne ne la voyait, personne ne savait.
Par la fenêtre, elle aperçut une ancienne demeure en pierre entourée de vieux arbres qu’elle ne
sut reconnaître. « On aurait acheté une maison semblable avec quelques travaux de rénovation
que nous aurions fait tous les deux. Nos deux ou trois enfants se seraient épanouis dans ce
cadre champêtre. Dominique et Léonie seraient les marraines des deux premiers. Ou peut-être
que l’une d’entre elles serait mon témoin au mariage» pensait-elle. Son sourire enthousiaste et
communicatif avait été remarqué par ses proches voyageurs, ce qui lui fit rougir un peu les
joues. Elle se redressa sur son fauteuil et commença un tour d’horizon des personnes qui
l’entouraient. Discrètement son regard se tourna vers son voisin dans la travée à coté. C’était
un vieux monsieur, un peu bedonnant, chauve, qui dormait la bouche ouverte. Derrière lui, un
espace avec deux banquettes face à face occupées par un couple assez âgée. En face d’eux,
deux jeunes gamins qui, à la façon de s’adresser aux adultes, se révélaient être leurs petits
enfants. Bruyants et se disputant pour un rien, les grands parents tentaient, bien que
difficilement, de maintenir un certain calme. Devant le dormeur, une jeune fille d’environs 18
ans, était plongée dans la lecture d’un livre. « Un gros livre, se dit Océane. Moi aussi plus tard
je lirai des bouquins, il faut que je m’y mette. »
« Madame ! Contrôle des billets s’il vous plait ». Ces mots la ramenèrent à la réalité. Elle
ouvrit son sac, fouilla un bref instant et retira le précieux laisser passer qu’elle tendit au
solliciteur sans même le regarder.
« Puis-je échanger la vérification du ticket contre la fin du voyage à coté de toi ? »
Surprise par cette affirmation, elle dévia sa tête vers cet audacieux étranger.
« C’est toi ? Que fais-tu là ? Tu m’as bien eue ! », Elle riait en enlevant son sac posé à coté
d’elle pour céder la place à Jean Yves. Certains des voisins se mirent également à rire. Même
le dormeur qui ne l’était plus, fût séduit par cette mise en scène.
« J’étais inquiet pour toi, nous n’avions plus de tes nouvelles. J’ai demandé à tes amies, à ton
usine. Je suis passé chez toi plusieurs fois. Je t’ai appelé et même laissé des messages, mais
sans réponses. Ce sont finalement tes parents qui m’ont expliqué ton attitude et m’ont
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