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lui déchirait le cœur. Elle ne pouvait même pas imaginer ce que Georges avait dû traverser
               pendant, et depuis cet évènement.


                   -  Georges, je… je suis tellement désolée.

               Sa voix se brisa sur le dernier mot. Elle ne pouvait pas pleurer, elle ne devait pas flancher.


                   -  C’est pas de votre faute mon petit, c’est pas de votre faute.


               Talia tenta de faire dévier la conversation, d’arracher Georges à ses vieux démons du passé
               qui dansaient devant ses yeux.


                   -  Vous aviez dit que vous m’attendiez, pourquoi ? le questionna-t-elle.
                   -  Parce que vous êtes ma dernière bouée de sauvetage. J’ai besoin de vous, Talia.

                   -  Vous avez besoin de moi ? Pourquoi ?

                   -  J’ai décidé qu’il était temps. Non, en fait,  ça fait des mois que je vous attends. Je
                      savais qu’un jour vous viendriez me chercher. Des mois que je sais qu’il est temps de

                      rejoindre la mer. Je suis prêt. Emmenez-moi la voir.

               Talia ne comprenait pas. Il lui semblait que Georges délirait. Il n’avait pourtant jamais été

               aussi lucide qu’en cet instant-là.

                   -  Vous voulez aller voir la mer ? Ou bien le lieu où repose Marie ?

                   -  Je… Je veux la voir une dernière fois.

                   -  Mais de qui, Georges ? De qui vous parlez ? Où voulez-vous aller ?
                   -  Je veux … j’en peux plus. J’ai essayé, mais je n’y arrive plus là.


               Les paroles de Georges se perdaient dans ses sanglots. Talia eu un pincement au cœur face à
               ce spectacle  déchirant.  Le marin avait définitivement perdu pied. En  même temps, ça se

               comprenait : il n’avait plus aucun repère, était cloitré dans ce vieux cagibi qui ne lui rappelait

               que ce qu’il avait perdu. Même la tâche de café était encore là, sur le tapis.

                   -  Je veux qu’on me laisse partir.

                   -  Qu’on vous laisse partir ?
                   -  Oui.

                   -  C’est-à-dire ? Georges, expliquez-moi.

               Le vieil homme reprit son souffle, s’essuya les yeux contre son épaule et les planta dans ceux

               de Talia. D’une voix qui se voulait  sûre et déterminée, il  expliqua à la jeune femme son

               profond dessein :

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