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semblait à Jeanne que la sculpture la protégerait et elle ne tenta pas de faire demi-
tour.
« Ah je comprends pourquoi vous plaisez tant à maman, vous êtes jeune et
mignonne et elle a toujours eu un goût prononcé pour les Lolitas. Je vous imaginais
plus sexy quand même. Franchement votre coiffure afro, les boucles d’oreilles
pendantes et la veste en jean tout ça me paraît bien trop peace and love pour elle
qui se pâme plutôt devant les stars hollywoodiennes. »
Jeanne avait du mal à comprendre où il voulait en venir avec ses propos à la limite
de l’insulte. Elle se sentait à la fois humiliée et médusée.
« Désolée, je me suis trompée d’étage mais je vais de ce pas administrer la piqûre à
Madame de Kerpoisson. Je la pensais seule et sans famille. Elle ne m’a jamais dit
qu’elle avait un fils, encore moins qu’il habitait si près de chez elle. Pourtant je crois
effectivement qu’elle m’aime beaucoup. »
Le bellâtre éclata de rire.
« Vraiment ? J’en doute, elle a la terre entière en horreur et depuis la mort de mon
père veut faire de son entourage ses esclaves. Vous en faites partie d’ailleurs mais
tout cela va cesser ce qui me permettra d’hériter enfin de tous ses biens et de faire
de cet immeuble le musée de mes rêves. »
La jolie infirmière le regarda stupéfaite :
« J’ai été vaccinée hier soir contre la Covid et malgré la fièvre et une très mauvaise
nuit je suis venue administrer la piqûre d’anticoagulants qui va permettre à votre
mère de passer ce mauvais cap et de s’en sortir. Donc je ne vois pas ce que vous
voulez dire. D’ailleurs je monte chez elle tout de suite. Au revoir Monsieur. »
« Vous ne voyez pas, Mademoiselle, alors je vais vous expliquer. »
Il s’écarta légèrement de la sculpture et fit quelques pas vers Jeanne.
« Vous n’avez pas envie d’améliorer votre quotidien, de vous offrir des robes
vaporeuses et des voyages au bout du monde ? Voilà ce que je vous propose en
échange de votre vie médiocre. Il vous suffira d’obtenir l’arrêt maladie qui expliquera
que vous n’avez pu faire l’injection aujourd’hui mais ne vous inquiétez pas, je m’en
occuperai. Ma mère succombera faute de soins mais personne n’en sera jugé
responsable et je vous léguerai une partie de sa fortune. »
Cette fois Jeanne se demanda si elle ne devait pas le dénoncer aussitôt à la police.
Non, le mieux était de tourner les talons et d’aller tout raconter à sa patiente. Elle se
remémora tous les bons moments qu’elle avait passés auprès de l’aïeule dont la vue
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