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qui, sans un mot, vient ramasser la marchandise au fur et à mesure. Lors de sa
               première visite, elle a tenté d’échanger avec lui mais a vite compris que l’homme, l‘air

               sévère et menaçant, ne souhaitait pas s’attarder : trop de clients qu’il est urgent de
               satisfaire, qu’il est urgent de tuer à coups de poudre blanche…. Esther ne pose pas

               de questions. Il lui versera l’argent une fois qu’il aura récupéré l’ensemble de la

               marchandise. Plus qu’une dizaine à expulser. Elle se rend aux toilettes pour la 9è
               fois de la journée. La tête lui tourne, elle a chaud, un volcan en éruption, un mélange

               de stress, de fatigue, d’excitation et de dégoût d’elle-même. Elle pense à Léo, elle a
               fait ça pour lui offrir une vie meilleure, et elle ne peut s’empêcher de penser aux

               enfants qui tôt ou tard consommeront cette drogue. Elle y est presque, il ne manque
               plus que 2 ovules et le compte sera bon. Elle se le jure, elle ne recommencera plus,

               cet enfer est presque terminé. Son coeur s’accélère, de plus en plus fort, puis…

               s’arrête.






               Mardi 15 février, 8h08


                   -  « Tiens, voici les 1500€ d’acompte. Tu toucheras les autres 1500 à ton arrivée

                      à Paris. Je te ferai connaître le lieu de livraison en temps et en heure. Des
                      questions ? »


               L’homme avait le regard dur et fuyant. Surprise par la rapidité des événements,
               Esther hésita, balbutia, elle devait se tirer d’affaire, sortir d’ici le plus vite possible.

               S’enfuir en courant ? Impossible, cet homme avait vu son visage, il la retrouverait, il

               ne la laisserait jamais tranquille. On n’était pas dans un film, c’était la réalité, elle le
               savait. Elle n’avait pas d’autres choix que de faire semblant d’accepter le deal, elle

               réfléchirait après. Quelques minutes plus tard, déboussolée, Esther remontait
               l’avenue du Manoir, cherchant où se réfugier. Quitter cet immeuble valise à la main

               l’avait plongé dans un grand isolement. A qui pouvait-elle s’adresser ? Qu’allait-elle

               faire de cette came ? Etait-elle suivie ? Comment s’en débarrasser sans mettre en
               péril sa vie et celle de Léo ? Ne devrait-elle pas aller directement au commissariat ?

               Le trafic de Cocaïne est un fléau et un drame humain en Guyane. Malheureusement,
               les autorités publiques sont impuissantes, tant la propagande est présente dans les

               quartiers défavorisés. Esther repensa alors à Teri, ambassadeur de l’association

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