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- Ne vous fichez pas de moi, ma petite dame ! La concierge a reçu votre appel hier et
me l’a transmis. Vous êtes bien Madame Arielle B. et vous venez trois fois par
semaine chez la vieille du 5 ème . Comme aujourd’hui !
- Oui Monsieur, c’est moi, mais je n’ai rien à voir avec votre histoire d’oiseaux. C’est
absurde : comment faut-il vous le dire ? Je n’ai pas de perroquet et je n’ai jamais
téléphoné pour ça !»
La petite dame en robe de chambre reparut dans l’embrasure de sa porte et
glapit :
« Si, Monsieur Blaise, si, je l’ai entendue, j’étais chez la concierge à ce moment-là. »
L’affaire tournait au cauchemar. Arielle eut tout à coup envie de planter là ces
deux hystériques et de grimper quatre à quatre les vingt-deux marches qui menaient
au 5 ème . (Elle les avait comptées : vingt-deux marches par étage. Et pas
d’ascenseur ! Mais l’exercice valait bien celui qu’elle ne ferait jamais en salle de
gym !)
Elle fut stoppée dans son élan par une poigne de fer qui lui broya le bras gauche.
En même temps, l’homme lui barrait l’escalier avec ce qui restait du toit de la cage.
« Lâchez-moi » dit-elle en lui balançant sa sacoche sous la ceinture. L’effet de
surprise fit se desserrer l’étau de la grosse paluche.
Au même moment, la naine en robe de chambre lança : « Pas de problème pour la
cage, Monsieur Blaise, j’en ai une grande de libre, si vous voulez ! »
Glissant comme une anguille d’entre les bras du géant, Arielle se rua sur l’escalier
et le grimpa plus vite qu’elle ne l’avait jamais fait. Elle frappa à la porte également
bleue de sa patiente, mais entra sans attendre de réponse.
Adossée au chambranle, muette, elle essayait de reprendre son souffle. Son cœur
battait la chamade. Dans le salon, la pendule sonna la demie. Depuis le boudoir
contigu à la chambre, une voix chevrotante lançait sur une note de reproche :
« Je vous attendais. Vous êtes un peu en retard, Arielle. Un ennui de circulation ?
Arielle ne put répondre, traversa la salle comme un zombi et se laissa choir dans
le fauteuil dédié à la télé. La voix âgée reprit, plus enjouée :
- Vous savez, je vous attendais ce matin avec beaucoup d’impatience. J’ai une jolie
surprise. Hier, j’ai reçu un cadeau, et il est pour vous.
Arrivée à la porte du boudoir Arielle put enfin articuler :
- Excusez-moi, mademoiselle, je suis désolée pour ce retard. J’ai eu une altercation
à l’étage au-dessous avec un grossier personnage, c’était pour une histoire de… »
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