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N° 7                                       Happy end


            Elle avait eu maintes fois l'occasion d'être appelée pour des soins urgents au 32, avenue
            du manoir, 5ème étage, porte gauche.

            Mais ce matin-là, fatiguée par une nuit d'insomnie, elle s'arrêta au 4ème étage, et frappa

            porte gauche.
            A  peine s'était-elle  aperçu de son erreur,  qu'une voix résonna dans la pièce du fond :

            « Enfin ! Je vous attendais ».
            Poussée par l'habitude, elle avait déjà franchi le seuil et s'était engagée dans l'entrée. Elle

            comprit qu'il était trop tard pour reculer  quand elle entendit  se refermer  derrière elle la
            porte palière. Le bruit sec et le cliquetis nerveux de multiples verrous la firent sursauter.

            Elle se trouvait dans un couloir identique à celui qu'elle arpentait d'ordinaire pour se rendre

            à la chambre de Marthe. Cependant, elle n'osa pas faire un pas de plus en découvrant,
            sanglée dans un fauteuil électrique, une femme qui dardait sur elle l’œil d'un Glock 17.

            Aucun tremblement n'agitait les mains tenant l'arme et la commande qui avait verrouillé à

            distance la lourde porte d'entrée.
                –  Je vous attendais ! Vous en avez mis du temps à venir ! C'est pas bien ça ! Pas

                    bien du tout !
            Marie tenta d'étouffer la vague de panique qui la gagnait. Alors qu'elle se croyait aguerrie

            après des années de pratique de médecine urgentiste, elle se retrouvait là, tétanisée par
            cette vision, dans un état proche de la terreur.

            Le ton de la  femme  contrastait avec son allure bourgeoise. Coiffure soignée, boucles

            d'oreilles assorties au collier, montre luxueuse, cardigan chic au plastron de dentelle, jupe
            noire aux plis impeccables qui couvrait les jambes mortes... Le tout parfaitement conforme

            au standing attendu de l'immeuble haussmannien. Marie perçut tout cela en un quart de
            seconde avant que son regard ne glisse vers le salon. Là, une improbable collection de

            nains de jardin batifolaient à la lumière des baies vitrées, tous horriblement colorés et plus
            hideux les uns que les autres. Mais elle n'eut pas le temps de s'y attarder, ramenée à la

            réalité par un inquiétant mouvement de l'arme toujours rivée sur elle.

                –   Allez ! Vous m'avez fait  patienter  trop longtemps, vous n'allez pas vous défiler
                    avant d'avoir terminé le travail ! C'est par là !

            La femme indiqua d'un geste brusque une porte sur la droite.

                -  Allez-y ! Vous allez voir, y'a du dégât !... Bon... Vous vous bougez ?... Et faudra bien
                    tout nettoyer. De toute façon, vous partirez pas avant que ça soit arrangé, tenez-



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