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Le félin se dirigea vers une petite porte déjà ouverte qui donnait sur un extérieur. Il se
               glissa dehors avec souplesse et facilité, tout en agitant la queue de façon malicieuse. Il savait

               très bien qu’elle était obligée de le suivre puisqu’elle ne savait pas comment se sortir de cet

               endroit ! La pauvre était coincée dans la porte et il lui fallut dix bonnes minutes pour s’en
               extirper.

                    Mais quelle ne fut sa surprise en découvrant les lieux ! Dans cet étrange monde où elle
               venait d’atterrir, il y avait plusieurs maisons où vivait une société de chats moderne  et

               civilisée. Elle ne pouvait pas s’empêcher de sourire en les imaginant lire le journal,

               confortablement installés dans des canapés… Le chat noir lui présenta plusieurs de ses amis
               parmi lesquels comptaient un vieux chat blanc très snob, un gros chat roux qu’on qualifiait «

               d’idiot du village », ainsi qu’un petit chat gris qui ne s’exprimait que très rarement. Tous
               retournèrent dans la demeure du chat noir avec mille histoires à raconter autour d’un bon thé.

               Après  avoir terminé sa  tasse, elle se mit  à bailler, bailler et bailler… à s’en décrocher la
               mâchoire !

                    — Avez-vous sommeil, très chère ? demanda le chat noir.

                    — Non, je ne crois…


                    Et elle en resta là. Elle n’eut pas le temps d’achever sa phrase qu’elle s’endormit sur la
               table. À son réveil, elle était allongée à même le sol sur une plaque d’égouts décorée de petits

               chats dessinés à la craie. Les chats errants se frottaient à elle, car elle sentait étonnamment

               fort l’herbe à chat.
                    Ce jour-là, elle n’alla pas travailler. Elle était bien triste d’avoir quitté son nouvel ami

               sans un « au revoir »  digne de ce nom,  et avait passé toute la journée à  ressasser les
               grotesques événements dans son lit.

                    Aujourd’hui, elle voulait que ce vendredi 13 se passe comme  n’importe quel jour de

               l’année. Pas de réveil trop tôt, pas de balade interminable sur des trottoirs fleuris, pas de
               retard. En somme, elle était sûre de son coup. Toutefois, lorsqu’elle mit un pied dehors, la

               pluie s’acharna instantanément sur son brushing. Les gens étaient tristes et personne ne la
               complimenta, puisque sa robe était cachée sous un imperméable bouffi. Elle crut voir un chat

               noir qui hérissait le poil après avoir été éclaboussé par un cycliste, et ce moment d’inattention
               suffit à ce qu’elle glisse dans les égouts…

                    Elle n’était pas mouillée, elle ne sentait aucune odeur nauséabonde et se mit aussitôt à

               rire.
                    « C’est très impoli de ne pas prévenir d’une visite », fit une voix qu’elle connaissait bien.

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