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Le tutoiement s’instaura immédiatement. Tu dors à quel endroit ce soir ? Je
n’ai rien décidé, je compte réserver une chambre d’hôte aux Orcades, près de
la plage. Je ne reste que trois nuits. La conversation reprit sur un mode léger.
Antoinette lui proposa de venir s’installer chez elles. Julie trouvant l’idée
géniale se joignit à l’invitation adoptant un ton suppliant :« Tu ne vas quand
même pas rester toute seule » ?
Elles insistèrent tellement qu’il eût été grossier de refuser leur offre. Virginie
fut sensible à leur généreuse spontanéité. Elle-même partageait cette
capacité à offrir, cela lui avait d’ailleurs parfois joué de mauvais tours.
D’un pas décidé elles prirent le chemin des douaniers, raccourci
qu’elles empruntaient pour aller et venir au bourg. Marchant près de ses
nouvelles compagnes, elle se sentit en confiance. L’air marin lui apportait un
réconfort inouï. Dans la dernière montée du sentier Virginie découvrit la
maison. De style breton, entourée de murets, le jardin à demi sauvage
exhalait l’odeur âcre de l’oyat envahissant les pierres. Un tamaris rouge
ployait dans le vent léger.
Ses hôtesses lui offrirent une chambre au rez-de-chaussée, avec vue
sur l’océan. Ses nouvelles amies dormaient à l’étage. Virginie accepta la
proposition, à condition qu’elle leur offrît un restaurant. Demain soir par
exemple ?
Plus tard, elles firent connaissance, installées sur la terrasse, savourant
ce moment d’étonnement où l’on se découvre. Amies d’enfance, voici quatre
années qu’Antoinette et Julie avaient fait le choix de vivre ici et ensemble,
attirées par la mer, les activités qu’elle offrait. Conquises par l’ambiance du
petit port de pêche, elles avaient décidé de quitter la ville et une existence
décevante, se contentant au début de petits boulots effectués dans les villas
fermées, entretien, surveillance, remplissage de frigos à l’arrivée des
propriétaires.
Avec fierté, Antoinette et Julie, lui racontèrent qu’elles s’étaient
associées pour créer une entreprise, nécessitant un investissement financier
conséquent . Elles étaient parvenues à acquérir une trentaine de dériveurs
d’initiation à la voile. Devant l’affluence de la demande elles s’en sortaient
plutôt bien !
Il avait fallu se battre pour y parvenir. C’est Antoinette la plus tenace
qui avait surmonté les démêlés administratifs tatillons retardant l’avancée
du projet. Heureusement , le maire soucieux de développer son image
dynamique les avait soutenues. Cela leur avait coûté une belle énergie, mais
elles ne regrettaient rien.
Créant leur site internet, le succès avait été immédiat. Julie s’avéra une
excellente gestionnaire, les tâches réparties sans difficultés. A présent tout
était en ordre.

