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« Tout cela a l’air délicieux ma tante ; merci encore de bien vouloir
m’héberger. »
« Enfin, c’est tout naturel, tu es ma nièce après tout. Mais, cela nous amène à
la raison de ta venue. Si tu veux, nous pouvons attendre jusqu’à demain pour
en discuter, mais il ne faut pas trop tarder. »
Apolline pâlit à ces mots. Elle aurait espéré éviter le sujet au moins un peu plus
longtemps, mais il lui fallait être forte.
« Je…je pense qu’il serait mieux d’en discuter maintenant. »
Clotilde lança un regard de pitié a sa nièce.
« Es-tu sûre ? Tu n’as pas l’air en forme. » Prise d’une soudaine panique, la
jeune fille se leva brusquement et partit en courant dans sa chambre.
Thomas fit mine de la suivre mais Clotilde l’arrêta d’un geste ferme.
« Elle a besoin d’être seule. Tu sais, elle n’avait pas une vie facile à Londres. Je
pense que tu mérites une explication, mais tu dois me promettre de ne rien
révéler à personne. »
« Comme tu le sais bien, la pauvreté fait rage dans les rues de Paris en ce
moment. Et c’est encore pire en Angleterre. Apolline a la chance de venir
d’une famille plutôt favorisée, mais elle a toujours été indignée par le sort des
familles pauvres. Malheureusement, tout le monde ne s’en soucie pas autant
qu’elle.
Elle avait l’habitude d’écrire des articles anonymes sur l’injustice de la société,
et elle ne craignait pas de faire connaître ses opinions. Il y a quelques
semaines, une des plus grosses banques de Londres a été dévalisée, et les
coffres des associations de charité du quartier ont mystérieusement doublé de
volume dans les jours suivants. J’ignore comment, mais l’enquête de police l’a
menée jusqu’à elle. Ils ont mis un mandat de recherche à son nom. Par
chance, elle a réussi à quitter le pays clandestinement. C’est là qu’elle m’a
contacté afin que je l’héberge, et tu connais le reste. »
« J’ignorais que c’était si grave ! Êtes-vous sûre qu’elle soit en sécurité ici ? »
« Il serait très difficile de retrouver son chemin jusqu’ici, mais, bien sûr, il nous
faut quand même être prudents. »
Le lendemain matin, Thomas se leva encore plus tôt que d’habitude pour
travailler et décida d’attendre Apolline pour lui parler. Environ une heure plus
tard, celle-ci descendit prendre son petit-déjeuner.
« Bonjour Thomas. dit-elle en le voyant. J’imagine que ma tante vous a tout
raconté. Pensez de moi ce qu’il vous plaira, mais je vous en prie, ne dites rien
à personne. »
« Bien au contraire, je trouve que ce que vous avez fait est incroyablement
courageux, même si bien sûr je ne peux pas vraiment approuver les méthodes
employées. Mais soyez tranquille, votre secret est à l’abri avec moi. »

