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- Ah oui, la gare. Pas grand-chose à raconter, en fait. J’ai eu un moment de
distraction, j’ai posé ma valise, elle a disparu. Le temps de la chercher le train est
parti. Voilà.
- Bon cœur contre mauvaise fortune, une valise perdue, un train loupé, quatre amies
retrouvées encore un soir, un petit sursis à notre séparation.
- Qui sera moins longue j’espère.
- Mais oui, pourquoi avons-nous laissé passer toutes ces années ?
- A cause d’Edith bien sûr
- Comment ça Edith ?
Jeannine rougit fort, toutes trois la regardent, la pendule sonne lentement.
- Mais c’est justement Edith qui nous a réunies cette semaine !
- Je suis sûre qu’elle est ici.
Marie-Claire, puis Monique, puis Béa, toutes trois tournent la tête vers la petite urne
de carton sur l’étagère parmi les livres.
Jeannine reste en off.
- Est-ce bien elle, vraiment elle ?
D’un même mouvement de tête elles reviennent vers Jeannine, qui se dirige vers l’urne.
Marie-Claire et Béa repartent à la cuisine avec les plateaux, sans Monique, elles s’étonnent.
Monique s’approche de Jeannine. Le visage vers la fenêtre elles suivent des yeux les phares
des voitures qui descendent l’avenue. On entend à tout moment le claquement d’une bouche
d’égout mal ajustée.
- On n’entend plus que ça dès qu’on y prête attention. Ma sœur a écrit, toujours pas
de réponse. La nuit c’est pénible.
- Je l’aimais tu sais.
- Oui je sais, je le sais depuis le début.
- Je l’ai aimée toute ma vie.
- La première fois est toujours la dernière.
- J’ai gâché toute ma vie amoureuse à cause de cette amitié inachevée, une amitié de
six mois !
- L’amitié d’une vie.
- Oh ma vie, elle a divergé de moi dès ce moment.
- On a deux vies.
- De temps en temps elle m’apparaissait en rêve. Toujours le même rêve. On se
croisait à la portière d’un train, un bonheur-éclair prenait possession de moi, je
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