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Elle les regarda toutes les unes après les autres.
Elle ne récolta pas le soutien qu'elle escomptait, et les mots de Julie creusèrent encore un
peu plus sa détresse :
- Oh, ce n'était pas la première fois !
Jacqueline eut l'air de trouver l'épisode très drôle, car au milieu d'un rire, elle enchaîna :
- et ça n'a pas l'air d'être une passade !
Mauricette ajouta :
- Oh ne fais pas comme si tu ne savais rien...
Philomène regarda ses amies une fois encore, et leurs visages déformés par les rires, à
travers les courtes flammes du feu, comme si elle les voyait pour la première fois...
Elle savait bien, ou du moins pensait savoir que Mauricette avait toujours été secrètement
amoureuse de William. Cela se voyait, mais tout le monde s'efforçait de faire comme si de
rien n'était. Nul doute que les autres filles le savaient aussi... Mais c'était ainsi. William
l'avait choisie, elle. Et ils étaient ensemble, partageant un petit appartement à Brest tous
les deux depuis deux ans déjà.
Mais là... Ce qu'elle entendait... Les bouches de ses amies tordues sur ces mots qui lui
retournaient le cœur... Comment était-ce possible ?
Philomène se leva et décida que ses vacances étaient finies.
Elle serra son gilet sur son cœur refroidi et marcha dans le sable aussi vite que sa fatigue
et sa détresse le lui permirent, en direction du camping. Partir, elle n'avait plus que cet
objectif en tête. S'empresser de refaire ses valises, et partir, loin de ce cauchemar et de
celles qu'elle croyait ses amies... Elle les entendait rire sur la plage, et l'appeler pour
qu'elle revienne :
- Philo, reviens, enfin, c'est pas si grave ! C'était la voix de Mauricette et les autres
riaient...
Une fois au camping, elle réveilla le patron du camping ; le chien aboya, sans doute plus
par habitude que par hostilité car il ne grogna pas quand elle entra, expliquant brièvement
qu'elle souhaitait régler son dû sur le champ car une urgence l'obligeait à prendre le
départ tôt le lendemain matin.
Le responsable du camping s'exécuta. Elle lui demanda alors s'il n'avait pas un petit coin à
lui louer pour le reste de la nuit : elle n'avait plus de lieu où dormir, il était à peine minuit,
elle était fatiguée, elle le réglerait aussi sur le champ... Il dut sentir la détresse de
Philomène car il ne dit rien, la conduisit dans un petit bungalow contigu à son cabanon, et
la quitta. C'était petit mais propre, Philomène n'avait rien besoin de plus : elle s'écroula sur
le petit lit une place, et sombra dans le sommeil. 3

