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-  Ah mais arrêtez de vous excuser sans cesse ! Aidez moi plutôt à le relever,
                      que j’évalue les dégâts.

               Elle s’exécuta. Une fois la statue de nouveau sur pied, il présenta les morceaux
               cassés et prit des mesures en bougonnant.

               Des sentiments ambivalents s’emparèrent de Sonia. D’un côté elle se sentait

               redevable de sa maladresse, et de l’autre elle ne pouvait se résoudre à rester sur un
               échec et devait absolument découvrir ce que manigançait le petit homme.

                   -  Ecoutez, je peux vous aider si vous voulez. Je n’y connais rien bien sûr, mais
                      je suis infirmière et donc très méticuleuse. Je suivrai vos instructions, voilà

                      tout.
               L’autre feint d’ignorer la proposition et continua à tourner autour de la statue. Se

               souvenant du nom qu’elle avait lu sur la porte, elle tenta de l’amadouer :

                   -  Je vous connais vous savez monsieur Lippi. J’adore ce que vous faites.
               L’homme leva un œil goguenard :

                   -  Arrêtez votre char, personne ne me connait.

               Sonia se hasarda :
                   -  Un jour que je cherchais de la déco pour mon salon, je suis tombée sur vos

                      œuvres sur internet. J’ai fait quelques recherches, et j’ai beaucoup aimé,
                      vraiment.

               Avec une pointe d’ironie, il demanda :
                   -  Ah bon. Et qu’avez-vous aimé ?

               Elle chercha une issue de secours :

                   -  Oh c’était il y a longtemps, je ne me souviens plus très bien.
                   -  Mmouais …je vois.

               Sonia sentit qu’elle devait prendre un risque supplémentaire :
                   -  Votre David là, c’est une version contemporaine de celui de Michel-Ange et

                      les accessoires ont leur signification : la moumoute pour le ridicule dont se
                      couvrent les artistes contemporains en essayant d’imiter ceux de la

                      renaissance, le masque d’escrimeur parce qu’ils se cachent derrière leur art

                      pour justifier leur manque d’originalité alors qu’ils utilisent les mêmes armes
                      que leurs prédécesseurs, et ce vilain flexible pour dénoncer l’intrusion de la

                      technologie dans l’art. Et vous savez quoi ? J’aime bien votre façon de voir les

                      choses.



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