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Thomas lui avait  également  parlé de Steiner,  personnage incontournable dans le milieu
               archéologique jordanien. La cinquantaine bien tassée, le visage buriné d’un homme de terrain,

               trapu et musculeux, il portait en permanence un feutre semblable à celui d’Indiana Jones qui
               le situait aussitôt dans tout groupe social. Sans être caricatural, il détonait cependant au milieu

               de ses collègues internationaux, plus sobres.

               Khaled et Steiner doivent se connaître, pensa-t-elle.  Khaled est passé il  y a trois jours à
               l’appartement des Fouchet. Marianne lui parle des derniers travaux de son mari qu’elle est en

               train de mettre de côté. Elle sort quelques minutes, le laissant seul. Il en profite pour subtiliser
               les planches de dessins  et les notes manuscrites que Marianne  a glissé dans une pochette

               transparente. Il sait à qui les vendre. A Heinrich Steiner qui s’intéresse depuis toujours aux
               travaux de Charles Fouchet. Khaled et lui se rencontrent au cours des conférences organisées

               par l’IFRA. Heinrich, comme la plupart des archéologues en poste à Amman, manie l’arabe

               aussi bien que l’anglais. Pourquoi pas ?
               Elle s’installa à une table avec les documents qu’il lui avait apportés et échangea des sourires

               avec  les deux chercheurs.  Elle feuilleta avec  curiosité  tout ce qui  concernait  la période

               nabatéenne. Le planning concocté par Thomas, prévoyait une troisième journée de recherche
               chez Marianne, puis, avec ou sans le fameux dossier Code Jordan, elle rentrerait à Paris. Petra

               et Aqaba seraient pour une prochaine fois.
               Elle redéposa la documentation sur le comptoir du bibliothécaire avec un sourire et quitta la

               pièce. Elle avait juste le temps de prendre une douche et de se changer pour le dîner.
               Le lendemain, elle était prête à continuer ses recherches, ne doutant pas qu’elle allait finir par

               mettre la main sur ce fichu dossier. Cette fois, elle commença par les cartons entassés près de

               la porte, les vidant les uns après les autres de manière systématique, et passant en revue ce
               qu’ils contenaient. Une  tâche ingrate sans grand intérêt, mais à laquelle elle s’appliquait

               malgré tout. Marianne  se faisait discrète  et  lui apportait  de façon régulière  du café  et des
               gâteaux secs aux fruits confits ; décidément, tout était bon ici. Machinalement, elle empilait

               les dossiers et s’efforçait en même temps de  mettre  un semblant d’ordre dans le fouillis
               qu’elle avait trouvé la veille en arrivant. Aucune note manuscrite ou étiquette n’évoquait le

               Code Jordan. Elle avait tout vérifié, tout feuilleté, tout classé, en vain.

               Le soir tombait.  Il était temps de  rentrer.  Elle était décidée à reprendre ses recherches de
               bonne heure le lendemain, dernier jour avant son départ.  La détresse  et la  gentillesse  de

               Marianne l’avaient touchée et elle l’embrassa. Elle dut accepter un sac qui contenait un reste

               de mansaf, un plat d’agneau et de riz, et une part de knafeh, une pâtisserie à la pistache. De





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