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Elle rouspétait intérieurement : « Encore un coup du chiffre 13 !
Impossible de se partager cette énième saucisse, je vais être obligée
de la manger un midi quand je serai seule. » Néanmoins, en sortant
de la boutique, elle souriait à l’idée de ce cadeau qui n’en était pas
vraiment un, mais qui lui semblait préférable à la radinerie.
Gabriel était journaliste et sa rédaction serait au complet, à
l’exception du rédacteur en chef, un jeune cadre, nouveau venu au
journal, et qui de toute évidence avait pour objectif de réduire les
effectifs. Ce dîner risquait donc de tourner à la veillée d’armes. Cela
n’inquiétait pas la maîtresse de maison, davantage troublée par les
insomnies de son mari dues à l’ambiance délétère au journal. Ga-
briel lui racontait tout ce qui se passait et elle était curieuse de voir
l’attitude de la rédactrice en chef adjointe, une certaine Alice, qui
semblait faire corps avec les journalistes, mais que son supérieur
courtisait.
Le soir venu, tout le monde était arrivé pratiquement
en même temps, quatre couples - les conjoints étant invités - et deux
femmes célibataires. L’apéritif se passait agréablement, les grandes
vacances étant encore dans toutes les têtes et les smartphones circu-
laient pour illustrer les meilleurs souvenirs. C’est à ce moment-là
que l’on sonna à l’interphone. Emma se leva en faisant des signes
d’étonnement et revint très vite, l’air effaré. « C’est votre rédacteur
en chef. Il dit vouloir participer à notre petite sauterie. Je lui ouvre ?
» « Bien sûr », répondit l’assemblée dans un même cri. Emma
s’exécuta, la femme pratique se disant que le boucher avait eu du
nez en lui offrant sa treizième saucisse.
Devant les verres servis dans la partie salon, les
quelques photos papier - des vacances toujours - posées sur la table
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