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choisit sur You Tube le deuxième concerto pour piano de Frédéric
Chopin, son compositeur préféré.
Cependant à lui seul, le départ du rédacteur en chef au-
rait suffi pour que l’atmosphère se détende. Plus personne ne sou-
haitait parler de la rédaction et chacun semblait penser « on verra
lundi ». Emma réussit même à faire rire en faisant remarquer que le
rédacteur en chef avait été le treizième à table et qu’il avait mangé
la treizième saucisse de son boucher. « Puisse-t-elle l’étouffer ! »,
s’était esclaffé son mari. Et l’on s’était séparé en se promettant
d’autres invitations.
Le lundi matin, dans le bureau du rédacteur en chef,
c’est la police qui accueillit les journalistes. Elle faisait s’asseoir
chaque nouvel arrivant et notait les noms et adresses, ainsi que la si-
tuation de chacun au sein du journal. La rédactrice en chef adjointe
avait bien essayé de savoir ce qu’il se passait, mais elle n’avait pas
obtenu de réponse. Dans cette salle comble, l’énervement était pal-
pable.
Cela ne dura pas. Après s’être présenté, l’inspecteur
Gandier se gratta la gorge et dit en essayant de voir toutes les têtes à
la fois : « Votre rédacteur en chef est mort, il a été assassiné. » Des
quoi ? Des non !, des c’est pas possible ! retentirent en même
temps. Le policier attendit que la pression soit retombée pour expli-
quer ce qu’il savait. « Cela s’est passé ici, dans ce bureau, il était à
sa place, un couteau enfoncé entre les deux omoplates. C’est la
femme de ménage qui l’a trouvé. L’autopsie est en cours, elle nous
apprendra l’heure du décès ». C’est en continuant à regarder un peu
tout le monde qu’il demanda si quelqu’un savait quelque chose. Il
n’eut pour réponses que des signes de dénégation.
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