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L’expérience de la strangulation avait été assez étrange : très difficile  à supporter, mais

            accompagnée d’un sentiment de toute-puissance. Cependant, Alan pensa que l’émotion et le plaisir
            ne relevaient pas du crime parfait qui devait être mené comme une expérience scientifique, c’est à

            dire sans que les émotions n’y prennent part.  Il pensa donc qu’il était  sage de renoncer  à tout
            contact physique prolongé avec la victime lors du meurtre.

            Malgré ses échecs qu’il considérait comme des tâtonnements, Alan ne perdait pas confiance, il était
            sûr que sa persévérance finirait par être récompensée.

                   Sa mère était infirmière au bloc opératoire de l’hôpital de Dinan. Alan connaissait certains

            de ses collègues dont une jeune anesthésiste qui l’accepta en stage d’observation . Elle lui fit visiter
            le bloc et lui présenta les outils et les produits qu’elle utilisait. Elle était aussi collectionneuse de

            poisons. Elle les gardait  naturellement sous clé dans son bureau. Elle lui montra sa collection, et
            durant la semaine, Alan réussit à subtiliser habilement une pipette de curare et quelques seringues.

            Cette fois, ça allait marcher ! Alan confectionna une mini seringue automatique qui délivrait sa dose
            dès qu’elle était plantée. Et le vendredi 13 février 2009 après midi, il planta sa micro seringue dans

            la nuque d’un passant, rue de L’horloge à Dinan. L’homme sursauta, retira l’objet d’un geste agacé

            et le jeta dans le caniveau sans même un  regard.  Il  continua sa route. Alan le suivit quelques
            minutes, le cœur battant. L’homme ne s’effondra pas, n’eut aucun symptôme d’une crise

            quelconque. Et s’il mourut quelques heures plus tard, Alan ne le sut pas.


                   C’est d’ailleurs un des problèmes du crime parfait : s’il est réellement réussi, il n’a pas l’air

            d’un crime. Et personne ne remarque qu’il y a eu assassinat. Cela ne devait pas empêcher Alan de
            poursuivre la mission de sa vie: accomplir une série de douze crimes parfaits ! Il avait l’ambition de

            devenir le plus grand et le plus discret des assassins. Et il réussirait !
                   Le vendredi 13 mars de la même année, il versa de la racine d’aconit qu’il avait séchée et

            réduite en poudre dans la tasse d’un homme qui regardait la télé, au bar d’un des cafés les plus

            fréquentés de Dinan. La première gorgée de café ne fut pas avalée mais immédiatement recrachée,
            la mixture était infâme. Le client ne risqua finalement qu’un œil au beurre noir tant le patron avait

            été excédé par la grossièreté de son client.


                   Alan eut alors trois années de pause, à la suite desquelles, lassé de l’empoisonnement, il se
            donna l’obligation d’improviser et ne prépara pas le septième crime. Il était chez son père dans le

            Trégor  pour les vacances de Pâques. Le vendredi 13 avril 2012, en  début d’après-midi, il se

            promenait tranquillement sur une plage quand il vit au loin une jeune  fille qui venait dans sa
            direction. Elle sautait à toute vitesse de rocher en rocher. Il obliqua rapidement vers le haut de la

            plage et se mit lui aussi à sauter très vite d’un bloc à l’autre. Quand il croisa la fille, il dévia de sa


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