Page 51 - tmp
P. 51
jaillissant des sièges juste devant, le rire en cascade de Noémie répondait à une saillie
brute de décoffrage de Charlotte.
Stupeur, frisson. Violette resta interdite. « Elles sont donc à portée d’oreille. Et si j’en
profitais pour écouter en douce ? Je n’aime pas ça, mais ce n’est rien d’autre que de
l’autodéfense » s’autorisa-t-elle. Elle n’eut pas à patienter.
« Entre nous, la Violette, elle se la pète, non ? » lança le timbre éraillé de Charlotte.
Et de surenchérir, encouragée par l’acquiescement trop mou à son goût de Noémie.
« Ben si. T’as pas compris ? Ces retrouvailles des anciennes de Ste Thérèse, c’est
une idée de qui ?
— Je ne sais plus…
— Qui a lancé l’idée ? C’est la Violette. Pour avoir l’occasion de faire la belle !
— Tu veux dire pour se mettre en scène ? C’est peut-être pas faux… Je n’avais pas
vu ça comme ça. Mais tu n’as pas forcément tort. C’est vrai qu’elle porte la robe noire
du barreau, elle ! Elle tient sa revanche sociale, ni plus ni moins. Et, l’air de pas y
toucher, elle le laisse transparaître. La fausse modestie bien rodée.
— Nous autres, pour la plupart, c’est du vrai, du modeste de chez modeste. Sauf
Isabelle et Virginie.
— Ceci dit, elle ne doit rien à personne, notre chère Violette. Elle est comme nous.
Issue d’un petit milieu. Ses parents sont agriculteurs à Bissey-sous-Cruchaud. Ils
tiennent une petite ferme, avec un peu d’élevage et quelques arpents de vigne. »
Un silence s’installa. Bruit d’eau bue à même la bouteille, suivi d’un soupir
sonore de contentement. C’était Charlotte. Désaltérée, elle se mit à minauder, mimant
le ton de confidence de Violette :
« Et toi Charlotte, que deviens-tu ?
2

