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plan scolaire, elles décrochèrent des situations enviables.  Gabrielle devint reporter à l’international et

            couvrit  fréquemment l’actualité de l’ex emprire soviétique. Clarisse prit la direction d’un magasine de
            design. Héléna s’épanouissait dans le commissariat d’exposition tandis que Marig gravit rapidement les

            différents échelons du Ministère des affaires étrangères et fit rapidement de nombreux voyages par delà
            les frontières.

            Deux semaines après ce voyage inoubliable Marig reçut une lettre oblitérée à Saint Petersbourg. Elle
            l’ouvrit fébrilement. c’était une longue déclaration d’amour en français dans laquelle Anton trouvait les

            mots justes pour enflammer la jeune fille. Des larmes de bonheur inondaient son visage et elle referma

            la missive comme un talisman qu’elle déposa cérémonieusement dans un petit tiroir qu’elle pouvait
            fermer à clé. Elle écrivit sa réponse dès le lendemain ; Elle ,si habituellement à l’aise pour disserter, ne

            parvenait qu’à raturer, à inspirer profondément les yeux perdus dans le vide. Elle voulait tant crier son
            amour en retour qu’elle en devenait muette. Il lui fallut trois bonnes heures pour accoucher d’un texte

            qui la satisfasse pleinement. Cette folle histoire épistolaire dura plus d’un an . Elle fut juste épicée
            d’une courte rencontre à Paris où Anton vint pour la première fois donner un concert à Pleyel en tant

            que soliste de l’orchestre philarmonique  de Saint  Petersbourg.  Il lui  avait adressé une invitation et

            Marig persuada sa mère qu’elles y aillent toutes les deux. Apès le concert alors qu’Anton et le chef
            Temirkanov étaient fétés comme des dieux, le jeune homme l’invita dans sa loge qui croulait sous les

            bouquets de fleurs  et  ce furent des étreintes et baisers  passionnés  avant que l’attaché de presse de

            l’orchestre ne vienne  rappeler  Anton à ses obligations. Avant d’ouvrir la porte les promesses
            solennelles d’amour éternel furent réciproquement échangées .

            Cet amour platonique dura jusqu’à ce que Marig  intègre Sciences Po l’année suivante et dispose d’un
            élégant studio près du Musée d’Orsay. Quelques jours après, Anton était dans les lieux inaugurant une

            semaine débridée. Leur première nuit d’amour fut comme une suite de déflagrations qu’ils tentèrent
            d’éteindre dans la journée. Ils faisaient le tour de galeries de peinture en cherchant un repos impossible

            dans les  coins tamisés de cafés branchés.  Et le  soir le carrousel des baisers et des  corps  entrelacés

            tourbillonait jusqu’à leur épuisement total. Ces rencontres se firent de façon régulière tant à Paris que
            dans d’autres capitales européennes au gré des vacances de Marig et des périodes de repos  que

            l’orchestre concédait à  Anton.  A ces  occasions  les corps étaient toujours en  fusion et les esprits se
            rapprochaient aussi grace à leur amour commun de la littérature et de la musique. Marig vivait comme

            dans un rêve . Sa seule petite contrariété était quand elle voulait aborder avec lui quelques sujets de
            géopolitique qu’elle avait approfondis dans ses cours à propos de la Russie . Anton s’en détournait par

            une pirouette soit en ne la prenant pas au sérieux soit par une moue légèrement dédaigneuse.


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