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- Madame ! Je crois que vous vous êtes trompée de place. Vous avez pris le siège
de ce Monsieur.
Chloé se sentit confuse. Elle s’excusa en souriant à l’inconnu qui attendait dans la
travée et se leva. Elle récupéra sa valise. Elle n’avait plus qu’une solution.
S’asseoir sur un strapontin dans l’espace à bagages en espérant ne pas être
contrôlée. Si c’était le cas, elle trouverait bien une explication plausible. Elle jeta un
œil à l’autre bout de la voiture. La porte s’ouvrait, se refermait. Des gens rentraient,
encombrés de sacs, leur billet à la main. Elle alla s’installer sur le siège étroit et se
plongea dans le polar qu’elle avait commencé une semaine avant. Elle lut
quelques pages et referma le livre. Impossible de se concentrer. Elle ne pouvait
s’empêcher de penser à son frère. Dix ans qu’il était parti. Disparu sans jamais
donner de nouvelles et, comme par miracle, il refaisait surface dans le train qui la
ramenait chez elle. Derrière la porte vitrée, quelques voyageurs somnolaient,
d’autres étaient fixés sur leurs écrans. La voiture baignait dans une douce torpeur.
Soudain, son regard se fixa plus loin, du côté des sanitaires. Un homme scrutait
l’intérieur de la voiture comme s’il cherchait quelqu’un. Un bref instant, elle crut voir
Mathieu. Sans réfléchir, elle glissa du strapontin et resta accroupie. Elle n’osait
plus bouger. Elle se releva lentement et se risqua à regarder. L’inconnu était
encore là mais elle s’était trompée, ce n’était pas son frère.
Tout cela était absurde. Elle respira un bon coup et ouvrit la porte. Il était temps
pour elle de retrouver Mathieu. Elle traversa le couloir et se faufila dans la voiture
seize. Elle le repéra vite. Il dépassait d’une bonne tête tous les autres voyageurs et
dormait paisiblement. Drôle de hasard, le siège, qu’elle aurait dû prendre au départ,
se situait juste en face de lui. Discrètement, elle s’y installa. Elle prit alors le temps
de l’observer. Ses traits, qu’elle croyait avoir oubliés, lui paraissaient maintenant
familiers. Nez fin, bouche bien dessinée, cheveux touffus, sourcils épais. Seul le
carré de son visage s’était affermi accentuant ses pommettes saillantes et son
large front. Il bougea légèrement la tête et ouvrit les yeux. À peine surpris de voir
sa sœur assise devant lui.
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