Page 100 - tmp
P. 100
— Tu devrais être contente pour elle. Il n’est pas trop regardant l’animateur préféré
des ados, visiblement, il préfère la viande marinée. La Miss, imagine le tableau
quand elle est sort de la douche ! D’ailleurs, elle peut en prendre, des douches ?
Vu qu’elle est appareillée pour des mois, vu que sa colonne est complètement
détruite et que sans ses deux canes, elle peut à peine marcher, encore moins
monter toute seule dans le train.
— On aurait peut-être dû l’accompagner à la gare. Le pire c’est le nez. Il est quand
même sacrément tordu. C’est pas brillant cette reconstruction, je la plains.
— On aurait dû… elle nous tombe dessus sans prévenir ! Bien sûr j’ai adoré la
revoir, après tout ce temps, l’hôpital, les opérations. Mais il y avait comme un
malaise, non ?
— Un gros malaise. Chez moi, elle est restée trois jours les pieds sous la table.
Elle a mal partout mais le coup de fourchette est toujours là. Ce type, ça ne lui
ressemble pas. Aller je file, une ligature sur un NAC.
Ça te va Greg ? Parce que Mulo, il ne dit pas grand-chose. Il « suggère » comme
disent les critiques. Je me débrouille avec ce que j’ai. Si tu n’es pas content, écris-la
toi-même ta story. Tu peux lâcher ton Stabilo cinq minutes ? Évidemment la copine
sur le quai elle est au bord du malaise, ses amies d’enfance la voient comme une
polyhandicapée qui a tiré le gros lot. Ça pue la jalousie, non ?
Et tu sais quoi, Greg, le coup de théâtre ! Ses pensées furent interrompues par l’arrivée
du train. Tu te rends compte, Greg, un train qui arrive dans une gare ! Forcément ça
met en pause toute activité cérébrale ! Cela sied-il à Monsieur pour le suspense ?
D’autant que dans le bouquin, on sait que le train pourrait ne pas arriver. Un incident
indépendant de notre volonté aurait crachoté le haut-parleur. Que je précise ? Un
sanglier facétieux, un corps délesté depuis un A380 venant s’écraser sur les rails, ou
le déraillement de la motrice juste avant l’entrée en gare — le conducteur a été piqué
par un taon embarqué en cabine — bref, toutes ces péripéties excitantes que peut
imaginer Mulo sans l’ombre d’une considération pour la pauvre scénariste qui devra
adapter ce tissu d’invraisemblances.
Il y a pensé, heureusement il a renoncé. Donc la déglinguée au bord du malaise voit
le train s’immobiliser. La porte s’ouvrit, elle mit un pied sur la première marche, leva la
tête et s’arrêta brusquement.
4

