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fragile… Elisa prodiguait des soins, elle ne créait pas la douleur. Son hésitation lui coûta
cher : d’un geste vif, la femme la renvoya vers son geôlier. Elle commença à s’inquiéter : et si

elle était tombée dans un traquenard ? Si l’homme bizarre qui se trouvait en face d’elle était
un maniaque, un homme dangereux ? Elle n’arrivait pas à lui donner d’âge, il semblait avoir

deux visages. Sa voix paraissait jeune, mais les rides au coin de ses yeux trahissaient un âge

plus avancé qu’il n’y paraissait. Rassemblant son courage, elle se tourna vers lui :

« Bon, que voulez-vous ?

- Je veux que vous fassiez ce pour quoi vous êtes grassement payée. Avancez donc !

- Et je suis payée pour… »

Elle ne put pas finir sa phrase. Un bruit sourd brisa le calme apparent de la résidence.
Tous tournèrent la tête vers l’étage. Cela provenait de l’appartement de Madame Picolli, elle

en était sûre. Laissant derrière elle ces deux inconnus, elle s’enfuit pour la rejoindre. Les deux

comparses, pris de surprise, n’eurent d’autre choix que de la laisser partir.

Montant l’étage à toute allure, elle arriva à la porte de sa patiente haletante, ressentant

une nouvelle fois les effets de sa nuit écourtée. Elle ne pouvait s’en prendre qu’à elle-même.
Son supérieur lui disait sans cesse qu’elle devait moins s’attacher à ses patients, moins mettre

d’affectif dans sa relation avec eux. C’était facile à dire pour lui qui voyait des patients une

fois tous les six mois, préférant plus s’occuper de l’administratif que des soins quotidiens. Ce
n’était pourtant pas un mauvais médecin, il avait fait des miracles avec certains considérés

comme désespérés par les autres psychiatres. Malheureusement, les dizaines d’années au
service des autres avaient usé cet homme prématurément. Il n’avait pas suivi le conseil qu’elle

martelait continuellement, et s’était trop attaché à une patiente. Jusqu’au point de rupture…

Elisa n’estimait pas être dans une position si vulnérable. Elle appréciait Madame Picolli,
certes, elle se levait aux aurores pour l’aider, certes, mais c’était tout. Pas de quoi s’inquiéter.

Ne prenant la peine de frapper, elle entra sans y être invitée. Et là, elle crut perdre la
tête. Devant elle se tenait l’homme du 4 ème étage avec la petite femme. Elle était pourtant bien

sûre d’avoir monté l’étage, son souffle court en était la preuve formelle. Décidément, plus rien
n’avait de sens ce matin. Épuisée, elle ne chercha pas à comprendre.

« C’est quoi cette histoire encore ? Vous avez un ascenseur caché chez vous ou quoi ? Qu’est

ce que vous faites là ? Où est Madame Picolli ?