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Elle est  descendue sans traîner, le quai était presque désert. C’est

                        normal, six heures quarante-cinq, c’est tôt pour un parisien. Le vrai, le


                        privilégié, celui qui vit et travaille intra-muros.


                               Le métro est arrivé au bout de cinq minutes. Elle est rentrée dans le


                        premier wagon,  elle s’est  assise  sur la banquette, et  elle a  regardé

                        machinalement autour d’elle, sans que rien n’accroche  son regard.  Son

                        esprit a commencé à divaguer, elle a pensé aux cours qu’elle avait prévus


                        pour la journée et aux jeunes qu’elle allait devoir affronter. Elle avait choisi


                        d’aider  les exclus du système scolaire, les  exclus du système tout  court,

                        ceux que l’on nommait les délinquants. Elle n’avait pas choisi la solution de

                        facilité mais elle savait que certains deviendraient des résilients et c’est pour


                        ceux-là qu’elle s’accrochait. C’était pour eux que chaque jour, depuis trois

                        ans, elle allait en Normandie, en train, pour travailler au centre d’activités de


                        jour d’Evreux de la Protection judiciaire de la jeunesse.  Elle a à peine eu le

                        temps de penser à son excursion du soir. Il lui tardait que la fin de l’après-


                        midi arrive pour aller chercher le collier de corail noir qu’elle avait vu dans

                        l’annonce d’un particulier.  Elle  avait  entendu dire que le corail noir

                        protégeait des énergies négatives et aidait à sortir des états de tristesse, ce


                        dont elle avait bien besoin...


                               Elle est descendue de la gare Saint Lazare et elle a slalomé entre les


                        voyageurs jusqu’à  son  quai pour prendre le train.  Elle  a pris place en

                        seconde car elle n’avait pas les moyens de s’offrir un abonnement mensuel


                        en première. Estelle  l’a rejointe  avec sa trottinette pliée sous le bras, elle

                        était en sueur comme tous les matins.  Elles  voyageaient  ensemble depuis


                        deux ans. Au début, elle la voyait tous les jours dans le train et une fois, elle

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