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Un sas de décontamination avec pédiluve était installé à l’entrée de la parcelle. Seules quelques

              personnes avaient l’autorisation d’y pénétrer et l’accès se faisait par reconnaissances ADN,
              vocale et faciale simultanées. Le capteur d’ADN acceptait comme échantillon tout ce qu’un

              corps humain peut produire (larmes, transpiration, cheveux, ongle, etc.). Le plus rapide pour
              Térébenthine était de cracher en disant n’importe quoi, car l’unité d’intelligence artificielle, à

              force de visites régulières, la connaissait mieux qu’elle ne se connaissait elle-même. Les

              concepteurs prétendaient d’ailleurs que l’unité était capable de prédire, avec un bon score de
              réussite, les dix prochaines probables bêtises que Térébenthine prononcerait pour entrer.

              Térébenthine s’amusait en proposant généralement des horreurs qui révélaient tout le mal
              qu’elle pensait du monde politique mais se permettait aussi parfois de bonnes blagues bien

              scatologiques ou des références au cinéma qui était sa passion. L’unité conservait pour elle le

              nom du gagnant de cette épreuve virtuelle.

              Térébenthine enfila, devant l’inspecteur, une combinaison intégrant un masque à gaz amovible.

              Les exemplaires en sa possession étaient issus d’un stock qui avait été commandé par le
              gouvernement pour protéger les équipes médicales contre la Covid2230 mais qui au final

              étaient arrivés sept mois après l’éradication de l’épidémie. Comme le protocole ne prévoyait

              pas que l’inspecteur y pénètre, Térébenthine entra seule dans le sas de décontamination et la
              mise en pression du sas avec un décontaminant débuta. Quelques secondes après, un signal lui

              indiqua qu’elle pouvait retirer son masque. Les bottes dans le pédiluve, elle adressa à l’unité
              d’intelligence artificielle un très moqueur « Marcello ! Don’t come here ! », elle cracha ensuite

              avec une grimace de dégoût. L’inspecteur ne pouvait heureusement ni l’entendre ni la voir. Elle
              préleva un bulbe et une fleur, en respectant le protocole. La récolte se faisait à l’ancienne, c’est-

              à-dire à la main ce qui permettait de vérifier visuellement la qualité. Elle enferma les

              échantillons dans un caisson stérile, étanche et transparent, qu’elle scella. L’inspecteur ne
              devait jamais être en contact avec les prélèvements pour éviter toute substitution. A l’intérieur

              du caisson se trouvait tout le nécessaire pour effectuer le prélèvement ADN et l’analyse.
              Térébenthine remit son masque et repassa par le sas de décontamination pour sortir, puis elle

              déposa le caisson devant l’inspecteur. Le caisson livra simultanément des données cryptées à
              deux entités d’analyse distinctes : l’une appartenant à Térébenthine, l’autre à la Société des

              Hautes Instances Terrestres et apportée par l’inspecteur. Térébenthine possédait une clef

              logicielle de cryptage connue d’elle seule qu’elle introduisit dans l’entité de l’inspecteur tandis
              qu’il introduisait une clef connue de lui seul dans l’entité de Térébenthine. Cette méthode

              d’échange croisé de clefs logicielles secrètes permettait de s’assurer que les entités n’avaient




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