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souvent le Docteur doit soigner l’esprit avant le corps. Cette stratégie lui permettait d’instaurer
              la confiance nécessaire au bon accomplissement de la guérison.

              Elle ajouta en lui tendant l’ordonnance :
              - « Reposez-vous - c’est essentiel - buvez régulièrement et, si vous en avez la possibilité, faites-

              vous des infusions de thym, sucrées au miel et citronnées ».

              Elle était en effet pour les médecines naturelles, en complément. Cela ne pouvait pas faire de
              mal, et surtout  leur apport psychologique  était reconnu : il était prouvé que faire participer

              activement le souffrant au processus thérapeutique en accélérait l’effet curatif.
              - « Allez… suivez bien mes recommandations, et vous serez vite rétabli ! »


              L’homme se confondit  en remerciements en la  raccompagnant, lui déclara  « qu’elle était un

              excellent Docteur » et « qu’il se sentait déjà mieux ».

              Cela ne faisait aucun doute : elle nota qu’il se tenait plus droit, que sa démarche était plus ferme
              et qu’il avait l’air beaucoup moins abattu. C’était une réaction classique, et elle y était habituée :

              dès lors qu’un malade a obtenu l’assurance de sa guérison ainsi que celle de ne pas être en

              danger de mort… il va tout de suite beaucoup mieux.


              Ce ne fut qu’après que la porte se fût refermée qu’elle ressentit sa présence. Son sang se glaça
              dans ses veines. Elle avait dû subitement pâlir,  et elle espérait qu’il ne  s’en était pas rendu

              compte. Elle fit un énorme effort pour se maîtriser, et tourna la tête dans sa direction.
              Il était là, immobile et impassible, se tenant devant l’ascenseur, comme s’il montait la garde.

              Il allait lui falloir l’affronter. A moins d’emprunter l’escalier, mais il n’était pas dans sa nature

              de fuir. En outre elle n’avait pas envie de descendre à pieds les cinq étages… avec la perspective
              qu’il puisse la suivre.

              Elle prit son courage à deux mains et s’avança vers lui. Quand la distance qui l’en séparait fut
              d’environ trois pas, elle s’arrêta et lui lança :

              - « Je suppose que vous allez me dire que « vous m’attendiez » ? ».
              Elle avait préparé son « attaque » en même temps qu’elle marchait. A son tour elle avait tenu à

              proférer ces mots sur un ton ambigu, prenant soin de n’y mettre aucune agressivité, mais mêlant

              à cette question rhétorique  un alliage subtil  de désapprobation et de lassitude.  Le tout
              accompagné du moins d’ironie possible.

              Il ne  réagit  pas. Comme si,  quelle que fût l’intention qu’elle  avait voulu mettre dans sa

              remarque, cela ne pouvait l’atteindre. En guise de réponse, il lui adressa un sourire tout aussi

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