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courrier dans la semaine qui avait suivie et se l'était elle-même collé sur le haut du bras gauche.

                   Entendre la petite voix claire et fluette de cette mamie lui parlant de livres pornographiques
            qu'il ne lirait jamais, le mettait dans un état second, ça le révulsait littéralement. Il aurait préféré la
            voir morte et en avait un peu honte. Ils s'étaient fait mettre la pression et n'avaient pu ni la gérer ni y
            résister. Venir lui parler de Fatima, de livres de cul !? D'où  elle sort  celle-là ? Il
            hallucinait littéralement!

                    −  Ces livres m'ont fait penser à Notre Dame de Fatima alors j'ai acheté un billet qui était en
                       promotion, c'était vraiment très bien organisé le e-commerce. J'ai téléchargé mon billet
                       d'autobus jusqu'à Nantes ou j'ai rejoint un groupe qui m'attendait à la gare routière puis
                       on a pris l'avion. On a très bien mangé. On est allé bien sûr à Fatima, regardez j'ai acheté
                       une médaille et ensuite on est allé à Porto visiter les caves, je ne bois pas mais c'était très
                       intéressant. C'est tout de même malheureux de ne pas pouvoir partir quelques jours sans
                       se faire cambrioler.
                    −  Soyez sans craintes madame, on va vous raccompagner chez vous, l'agent de service
                       vous expliquera pour l'assurance et les réparations.


                   Bon ça finissait bien, aurait mieux valu d'être  sourd que d'entendre  ça ; mais il restait
            maintenant à l'inspecteur d'appeler quand même le commissaire et la préfecture...et le Télégramme
            de Brest...C'était écrit, c'est lui qui irait à Canossa et il n'appréciait guère.



                                                       EPILOGUE

                   Le commissaire apprenant le retour de la trop discrète veuve, entra dans une colère froide.
            La vexation était insupportable, l'affront trop fort. Il fallait absolument qu'elle paie le prix de son
            outrecuidante légèreté et soit retirée de la circulation pour ne pas qu'une histoire comme celle-là se
            reproduise.   Une stratégie d'intervention fut vite échafaudée avec le concours de l'inspecteur tout
            acquis à ce règlement de comptes. Ce dernier prit ainsi son meilleur air patelin et s'en alla faire
            signer un courrier à la docteure précisant que la pathologie de cette patiente avait atteint un stade
            avancé et qu'il n'était sage de la laisser vivre seule dans un grand appartement au 5ème étage.
                   Le commissaire après s'être  entretenu  au téléphone avec le substitut,  fit son affaire de la
            cheffe de cabinet du préfet qui fit parapher sans coup férir par son patron, un arrêté d'internement.
                   La veuve de l'officier dont la retraite  couvrait largement les frais d'hébergement fut donc
            admise sans difficulté dans un établissement spécialisé qui venait d'ouvrir ses portes à proximité du
            cap Sizun. Son étonnement et ses protestations demeurant sans réponse, elle se fit une raison et très
            vite, elle y pris ses marques. Il lui était formellement interdit d'accéder à un ordinateur pas plus qu'à
            quelque livre que ce soit et la compagnie des autres pensionnaires la mortifiait. Sa gentillesse et sa
            politesse surannée mirent en confiance le personnel de l'établissement si bien pouvait tout à loisirs
            partir en promenade dans la périphérie. Un  jour  plus venteux qu'un autre, l'herbe du printemps était
            encore toute humide de la rosée du matin, quand la bourrasque caractérielle d'un  anticyclone
            imprévisible, lui fit perdre l'équilibre et glisser sur la végétation rase. Elle chuta au bas de la falaise
            abrupte. Deux jours plus tard, son corps sans vie fut retrouvé sur la plage en contre-bas et envoyé à
            la morgue de Quimper ou le médecin légiste constata le décès par chute d'une grande hauteur puis
            découvrit avec  étonnement la présence de  ce  patch inconnu sur son bras.  Il  en préleva un
            échantillon qu'il envoya pour analyses à l'institut Pasteur à Paris. La veuve fut enterrée dans la
            caveau familial du cimetière de St  Lunaire,  à côté de ses parents.  L'organisation et les frais


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