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Le manoir de l’avenue du Manoir. Elle aurait été happée dans un trou noir qui l’aurait projeté
à travers les couloirs du temps dans le vieux manoir de l’avenue du même nom. Un manoir
hanté forcément. Arrête Béré, tu perds la boule, c’est pas drôle. Soudain les flammes
vacillantes des candélabres dévoilèrent une silhouette inquiétante. Une sorte de spectre,
trônant dans un immense fauteuil, drapé dans un lourd voile noir, nimbé de vapeur blanchâtre.
Non, là c’était vraiment pas drôle du tout.
Bérénice adorait les films d’horreurs, les thrillers sanglants, les romans haletants. Mais bien
au chaud sous sa couette, son chat serré contre elle. Pétrifiée à la vue de cette apparition, elle
se jura, si elle s’en sortait vivante, de ne plus jamais regarder que des comédies musicales ou
des dessins animés.
« Une femme ? croassa la voix, sévère. D’habitude ce sont des hommes que l’on m’envoie
pour ce genre de mission. »
Interloquée, Bérénice fit courageusement face à l’étrange et inquiétante créature.
Petit à petit, ses yeux s’habituaient à la faible lueur. Ce qu’elle distingua derrière l’épais tissu
lui fit froid dans le dos. Deux yeux rouges, dans un visage pâle et osseux, la dévisageaient
fixement.
« Eh bien allez-y. Faites ce que vous avez à faire. Qu’est-ce que vous attendez ? Ne me dites
pas que vous n’avez pas eu les instructions ? Vous voyez bien qu’il y a urgence » dit
férocement la voix.
« Mais je… » chevrota Bérénice.
« Je vous en supplie, sortez-moi de ces ténèbres, rendez-moi la lumière, délivrez-moi de cette
froidure…. » coupa la voix soudain implorante.
Ça devenait carrément flippant. Dans quel guet-apens s’était-elle fourrée ? Une messe noire ?
Une séance d’exorcisme ? En gros, le Diable en personne lui demandait de l’arracher à
l’Enfer… D’un côté, elle avait un peu moins peur, de l’autre, elle se disait qu’elle avait intérêt
à faire ce que cette voix démoniaque lui demandait. Sauf qu’elle n’avait pas la moindre idée
de ce qu’elle devait faire. Elle se remit à trembler, mais de froid cette fois. Elle était gelée,
frigorifiée, parcourue de frissons. Il paraît que les fantômes dégagent un souffle glacial…
mais non, n’importe quoi, je ne crois pas aux fantômes. Je ne crois PAS aux fantômes… Mais
si ce n’est pas un fantôme, alors c’est quoi ?
Des pas précipités se firent entendre dans l’entrée. Bérénice se cacha prestement derrière une
commode. Ca y est, les disciples rappliquent, c’est bien ça, une réunion secrète, un rituel,
un… un sacrifice ???