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N° 109 DROLE D'ODEUR

Elle avait eu maintes fois l'occasion d'être appelée pour des soins urgents au 32,
avenue du manoir, 5ème étage, porte gauche. Mais ce matin-là, fatiguée par une nuit

d'insomnie, elle s'arrêta au 4ème étage, et frappa porte gauche. A peine s'était-elle

aperçue de son erreur, qu'une voix résonna dans la pièce du fond : « Enfin ! Je vous
attendais ».

Mélina n'hésita qu'un bref instant. Ce qui la décida, ce fut la légère fumée qui filtrait

sous la porte. Mais l'odeur diffuse qui s'en échappait n'était en rien celle d'un
incendie. Intriguée, l'infirmière tourna doucement la poignée et s'avança dans le

couloir. Machinalement, elle se recoiffa avec les doigts en passant devant le miroir
suspendu au-dessus d'une console. Posés sur celle-ci, mêlés à de grosses bougies,

dont la flamme se reflétait dans le miroir, des bâtonnets d'encens répandaient leurs

senteurs entêtantes de santal et de cannelle.

Immédiatement, Mélina se trouva transportée en arrière, au bon vieux temps - qui, à

la réflexion, n'était pas si bon que ça - quand les soirées se terminaient dans une

orgie de cannabis et d'étranges boissons au goût âcre. Vaguement réprobatrice, elle
prit le temps d'examiner les nombreuses gravures et lithographies qui ornaient les

murs sombres de l'entrée. Elle n'y connaissait pas grand-chose mais reconnut au
passage quelques dessins de Miro et des reproductions de Dali. Datant des années

80, selon ses souvenirs.

Elle soupira, sa jeunesse se délitait peu à peu dans un quotidien morne et sans
surprises. Elle avait fini par se laisser aller au fil des jours, même si elle veillait à

conserver l'allure fraîche et soignée que doit arborer toute infirmière. Aussi, quand
l'imprévu surgissait, elle l'accueillait avec plaisir. Mais une atmosphère inquiétante

régnait dans ce couloir et l'infirmière commençait à se demander où elle était

tombée.

- Eh bien, qu'est-ce que vous attendez ?

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