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Elle caresse longuement le visage de l’homme, imagine ses souffrances, pour en arriver là, ou même
simplement son gout pour la défonce. Elle guette sur son visage, un frémissement, un signe quelque
chose qui témoigne d’un retour à la vie…
A l’étage du dessus, la dame halète, martèle faiblement de ses poings le plancher. Elle a du tomber
de son lit. Une plainte infinie s’élève… se prolonge…
Puis soudain un cri rauque… et plus rien…
Au même moment l’homme ouvre les yeux, perdu, son regard papillonne dans le vide. Il voit sans
reconnaitre le visage de la jeune femme. Il voudrait parler mais ne le peut pas. Il sent une pression
sur sa main, apaisé, il referme les yeux. Sombre dans un sommeil profond. Son cœur a repris un
rythme normal.
La jeune femme, se lève . Elle range ses instruments, sa sacoche. La laisse dans l’entrée. Elle ne s’en
servira plus jamais. Sa décision est prise.
Elle ouvre les fenêtres, l’air frais de Paris envahit la pièce, les klaxons des voitures montent jusqu’au
4 éme. La vie…la vie revient…la vie repart.
Elle se met à ranger la pièce, pendre les vétements qui trainent, glisser les papiers dans le tiroir du
bureau bancal. Préparer un café..
L’homme du 4 éme étage est sauvé.
La dame du 5 éme étage est morte.
La jeune femme s’est réconciliée avec la fillette d’autrefois. Elle sait qu’elle sera jugée pour cet acte,
mais elle se sent en paix.
Un dernier regard à la pièce. Elle sourit, oui elle est en paix…
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4 Mois plus tard
La jeune femme arrose ses plantes sur son minuscule balcon. Elle a du temps maintenant, beaucoup
de temps… elle n’a plus de travail… Elle n’a plus de collègues non plus. Les dos se sont tournés quand
« l’affaire s’est sue »… elle n’a plus de contact avec sa famille non plus, les regards désapprobateurs
des uns et des autres ont installé une certaine distance. Tout cela importe peu… elle est heureuse
elle se sent en accord avec elle-même, en accord avec a vie.
Une sonnette retentit… d’un pas menu, elle se dirige lentement vers la porte, l’entrouvre persuadée
qu’il s’agit là d’un démarcheur.
Non. Un homme grande silhouette dégingandée se tient dans l’embrasure. La silhouette lui rappelle
quelque chose. Avant qu’elle ne parle, l’homme tend un modeste petit bouquet de marguerites. Elle
le dévisage… c’est l’homme du 4 éme … enfin ça lui ressemble. Mais un homme au visage lisse,
apaisé, droit. Il lui sourit…elle lui sourit…
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