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Remplie d’émotions et bien incapable d’en lire le moindre mot, elle demanda à l’inspecteur
               d’en lire le contenu. Elle blêmit d’émotion à l’écoute des premières phrases :





               « Jacqueline, c’est bien ton prénom je crois savoir ? Je t’écris, je vous écris à toutes deux, ce
               premier et dernier hommage, une sorte de « Rimbaud Warrior » en guise d’adieu, presque

               comme un « test-amant ».


               Sois indulgente avec moi. Je n’étais qu’un pauvre addict des mots et des maux sans grand

               talent, si ce n’est celui de susciter auprès de mes derniers amis, un peu de compassion.

               J’ai de la chance. Même si je suis seul maintenant, je ne crains personne puisque dans le

               secret et le silence, je t’ai aimé. Désormais je ris, je danse, je pleure avec toi, mais surtout sans

               toi, du soir au matin, ballets alcooliques de mes jours et de mes nuits. Je suis l’élu inconnu de
               ton cœur. Tu es celle que j’ai courtisé dans le silence de l’espoir , sans pouvoir t’apprivoiser,

               amour fidèle qui m’attend de l’autre côté pour espérer rêver le vaste monde. Et toi ma
               Jacqueline, sans le savoir, tous les soirs tu me faisais rêver au bord du chemin, cuillère

               d’argent et morceau de sucre au creux de la main.
               Absinthe chérie, Jacqueline chérie, vous êtes le poison et l’antidote qui entretiennent

               l’illusion, l’élixir qui me transporte avec douceur vers la mort.


               Alors j’implore ton sourire, qui planerait sur mes lèvres, avant que je fonde en victime
               consentante sous l’aiguillon du bien, la tentation du mal, subtil parfum de folie qui vient

               fondre dans ma gorge. Entre deux  incendies, le feu de l’alcool me brûle sans relâche et coule

               dans mes veines, comme un miel de poison et de mort lente.

               Rencogné près d’une porte qui jamais ne s’ouvrira, au début bien malgré moi, j’ai écouté puis

               goûté, le souffle du vent mauvais, ce parfum d’ivresse qui couvrait mes prières et mes

               derniers espoirs. J’ai alors attendu la délivrance, sans bouger, aux portes de notre jardin
               secret. Mais toi ma belle infirmière, tu n’es jamais venue cueillir les fleurs de ma dépendance,

               le fruit de mes passions destructrices. L’empreinte de tes parfums s’est évaporée sur les allées
               abandonnées de ma raison, ultime trahison qui m’obsède, me ronge et me coupe du monde

               des vivants. Tu veux savoir pourquoi ce matin j’avais les yeux mauvais ? Dans la pénombre
               de l’antichambre de la mort, accorde moi quelques derniers instants, au travers de ces

               quelques lignes.




               2 – 12 ième  Edition Concours de Nouvelles sous la Plume - 2021
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