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N° 27         ON A MÊME RETROUVÉ LA DENT








               Il pleuvait ce jour-là lorsqu’elle s’est levée.

               « Ah ! au fait quel jour sommes-nous ? » se dit-elle.

               « Vendredi 13 ?! Zut ! »

                      Elle n’aimait pas les vendredis 13 qui lui réservaient toujours des surprises. Et cette

               année, on était servi, on en était au troisième. Et pour l’accabler, un vendredi 13 novembre,
               les pires ! Qui avait commencé dès la veille avec l’énigme de la dent. Toute une affaire. Noé

               avait perdu sa dernière dent de lait ce jeudi 12, doublement perdue puisque depuis elle restait

               introuvable. La petite pièce sous l’oreiller n’avait pas consolé Noé de la disparition de sa dent
               et il avait mis toute la famille en campagne pour la retrouver. Son grand frère s’en était amusé

               et l’avait rassuré d’un souriant « t’inquiète, tu la retrouveras avant ce soir ta dent » … Elle
               aurait pourtant juré l’avoir aperçue, abandonnée, sur la table basse du salon. Finalement, ce

               serait peut-être là l’évènement de ce vendredi 13 novembre : la perte totale et irrémédiable de

               la dent de lait de Noé… Non, en matière de coup du sort, c’était un peu faible. Parce que des
               coups durs un vendredi 13, elle pouvait en raconter.


                      Tiens, celui de février 2009 par exemple. Un temps de pluie combiné à un froid de

               canard, une journée épouvantable ! À ne pas mettre un humain dehors. Eh bien, il lui avait
               pourtant fallu sortir, faire les courses pour la famille, s’affronter aux giboulées, piétiner dans

               les flaques, rentrer trempée comme barbet… un vendredi 13, quoi. Elle s’en souvenait très
               bien parce que c’est ce même jour qu’elle avait eu la confirmation qu’elle était enceinte de ce

               fameux Noé aujourd’hui en quête de sa dent. Et la même année, l’exaspérant 13 mars… Que
               ne lui était-il pas arrivé ce jour-là ! Ça avait commencé  dans la file d’attente du supermarché

               alors qu’elle était déjà en retard. M. Lebrun, son surgelé dans une main, sa bouteille d’eau

               dans l’autre, était passé sans vergogne devant elle et son chariot débordant. Et même pas un
               merci. Même pas un bonjour. À peine sortie du supermarché, elle était tombée sur Mme

               Bertrand qui pendant près d’une demi-heure lui avait fait la liste de tous ses maux et

               malheurs, la mettant définitivement en retard pour la journée, journée où tous ses clients,
               aucun pour rattraper l’autre, avaient été d’humeur exécrable, désagréables autant qu’il était

               possible. Il lui avait fallu des trésors de   longanimité pour se maîtriser, rester aimable,


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