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peut-être une  personne  de l’immeuble, une  gardienne ou n’importe qui entrerait dans le
               bâtiment et elle en profiterait alors pour filer. Personne. Même sur le trottoir, pas âme qui

               vive, juste le ciel plombé de ce début d’avril. Au-dessus de quelques poubelles un panneau
               d’affichage blafard annonçait la sortie en salle du dernier film de Catherine Laneuve et cela

               semblait étrange et déplacé dans cet univers lugubre et ces circonstances angoissantes. Elle se

               résolut donc à charger le sac dans la voiture et à y prendre place.

                     L’homme démarra, déboitât sans difficulté  et  poursuivit la rue du Manoir jusqu’à

               l’angle de la rue Thierry Paulin pour prendre l’avenue Petiot. Ils quittaient peu à peu le centre
               et Sophie regardait maintenant la voie déserte  défiler  avec  ses  quelques pavillons puis des

               entrepôts abandonnés. L’infirmière entrevoyait de moins en moins de chances de s’en sortir

               vivante. Il lui dit :

                            - C’est Lucien qui t’a envoyé ?

                            - Oui, murmura-t-elle
                            - C’est la première fois que je te vois, tu travailles souvent pour lui ?

                            - Non, pas souvent.

                            - Moi je travaille qu’avec lui. C’est mon sixième contrat avec lui.
                            - Ah oui, six… balbutia Sophie.

                            - Oui avec Lucien c’est carré et bien payé. Je sais que je peux lui faire confiance.
                      Il me dit ce qu’il veut, et moi j’exécute, c’est net. Pas de lézards.

                            - Oui c’est appréciable. Je comprends.

                            - Parce que dans ce métier, vous pouvez pas imaginer ce qu’il y a comme petits
                      marlous, du petit jeune qui s’y croit et au pied du mur on s’aperçoit qu’ils n’y

                      connaissent rien à rien. Faut faire le tri. Tenez, je vous dis ça je vous parle d’un contrat
                      que j’ai eu à Naples chez les ritals.

                            - Ah oui ? Vous avez des contrats même à Naples ? fit Sophie terrifiée.

                            - Oui, mais j’aime autant vous dire que c’est pas coton là-bas ! Y a de la main
                      d’œuvre en pagaille. Faut faire attention au matos sinon tu te le fais faucher en moins

                      de temps qu’il ne faut pour le dire. Ça je dois dire c’était pas simple comme mission.
                      Là-bas faut y aller des coudes sinon tu te fais doubler. Mais bon j’avais Lucien qui

                      m’avait engagé alors c’est moi qui ai fait  le  contrat de A à Z.  Elle veut un  Paris-

                      beurre ?
                            - Pardon ?




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