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drogue en échange d'une rémunération.). Les locataires, des pauvres, voyaient par ce deal un
               moyen  pour survivre, cumulé avec les APL;  furent interpellés. Mais aucuns des deux

               n'avouèrent avoir participer à une quelconque farce peu ragoûtante envers ce médecin.


               L'affaire en resta là pour les autorités mais le mystère restait entier. Pourtant, il n'y avait pas
               eu que les messages téléphoniques, pensait elle. Que dire de cette inscription peu banale dans

               la cage d'ascenseur et puis surtout elle n'oubliait pas les interpellations vocales qu'elle avait

               subie en montant dans cet immeuble et dans les deux logements vacants.

               Ce satané 32, avenue du manoir était bien connu pour nicher un parfait condensé de misère

               sociale, avec son lot de trafics underground,  mais cette banalité du quotidien des quartiers
               défavorisés et cette histoire étrange ne justifiait pas qu'elle abandonnât tous ces gens à cause

               de ce simple évènement insondable.


               Elle continua donc à œuvrer sur place avec un certain courage.


               Et se rendit dés le lendemain au quatrième étage, par la seule voie autorisée ce jour là par les
               trafiquants, c'est à dire en montant deux par deux les escaliers, les affaires ayant repris .


               Fatiguée par une nouvelle nuit d'insomnie, elle  stoppa  par erreur  au troisième, au lieu du

               cinquième et frappa à la porte de gauche. En vérité, elle souhaitait ardemment que ressuscite
               encore cette voix nasillarde qui la hantait désormais. Elle voulait entendre encore une fois cet

               appel à entrer, ce témoignage  en forme de  remerciement vis à vis de  cette  ascèse qu'elle

               s'imposait depuis si longtemps, au comble de ses forces, pour aider les plus démunis. Elle
               avait envie de lire sur une porte ou sur un vasistas ébréché le même texte de reconnaissance

               qui s'était affiché dans l'ascenseur, quelques jours plus tôt.

               Elle voulait qu'on l'aime. Qu'on l'a remercie.


               Et elle comprit alors que toute cette histoire était un leurre, une vue de son esprit fatigué par le

               don de soi, qu'elle existait seulement dans ses désirs inconscients. Personne ne l'appelait de

               cette manière implorante, il n'y avait pas de voix sous le soleil, tout n'était pour elle que vanité
               à l'espérer.


               Une hallucination.


               Elle décida de prendre  des  vacances et de  cesser d'écouter  ces voix intérieures qui ne lui
               disaient rien qui vaille.



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